Au sein d'un clergé séculier breton aujourd'hui bien connu, les 752 chanoines des neuf cathédrales bretonnes du siècle des lumières restent dans l'ombre. Chargés d'assurer le service des églises-mères des diocèses et d'en administrer les biens, ces clercs, souvent confondus avec leurs successeurs du XIXe siècle, sont relégués dans un véritable purgatoire historique. Or, entre les évêques et les recteurs, ils mènent une carrière autonome puisque plus de la moitié n'occupe qu'un bénéfice : le canonicat. Bretons, prêtres, gradués de l'Université, issus des catégories supérieures de la population dans une large mesure, ils constituent des chapitres relativement homogènes. Clercs modelés par les exigences tridentines, ils remplissent avec sérieux les devoirs spirituels et temporels qu'imposent leurs bénéfices. Membres d'institutions modestes à l'échelle du royaume, les chanoines bretons contribuent à la pénétration de la modernité dans les villes bretonnes du XVIIIe siècle. En effet, même si les revenus de leur compagnie ne leur assurent que des prébendes modiques, ils adoptent progressivement les habitudes des élites urbaines en matière de logement, de confort, de consommations. Leur culture intellectuelle elle-même témoigne des changements en cours dans la société. Rarement précurseurs, ils ne sont en rien étrangers aux évolutions du monde dans lequel ils vivent. Ce sont tous ces personnages - présentés individuellement dans un dictionnaire biographique - que ce livre veut faire revivre dans l'accomplissement de leurs tâches, comme dans leur intimité.