Adam et l'astragale, deux faces d'une même question : celle de l'homme et de son humanité.
Un homme, dans la tradition occidentale, c'est d'évidence un fils d'Adam, qui fut créé de toutes pièces et d'un seul coup par Dieu, à son image. L'homme y est animé de raison, pour se distinguer de l'animal, mortel pour se distinguer des anges. Autant de définitions créationnistes de l'origine de l'homme : celui-ci existe d'emblée et sa nature le sépare radicalement de son environnement.
L'astragale, c'est ce petit os du pied présent chez tous les primates et chez l'homme. C'est parce que l'astragale humain forme un angle presque droit que l'homme peut se déplacer debout longtemps, libérer ses mains, développer son cerveau. Cet os minuscule, comme tant d'autres critères, incarne une vision plus continuiste de l'origine de l'homme : l'homme est ici un animal parmi d'autres. Ce n'est que par l'apprentissage d'une culture spécifique, par l'acquisition de certains comportements et valeurs, qu'il devient un humain.
Face à une vision simpliste de l'histoire de l'idée d'humanité, qui expliquerait en termes de progrès unilatéral le passage d'Adam à l'astragale, d'une vision religieuse à une vision matérialiste, ce livre révèle l'imbrication voire les tensions des deux modèles à travers les époques. Au lieu de définir l'être de l'humain en s'appuyant sur les seules références philosophiques ou dogmatiques, il interroge les discours et les pratiques qui ont déterminé et déterminent les limites de l'humain. Un tel questionnement demande une approche transversale, multidisciplinaire.
L'humanité mise à l'épreuve en tant que valeur communautaire, principe d'exclusion, modèle normatif de comportement, tel est le fil conducteur de ces essais d'histoire, de philosophie, d'anthropologie et d'éthologie. L'Occident médiéval est ici leur centre de gravité. Car c'est là qu'Adam, le chrétien, l'image de Dieu, qui nous semble si étranger, évidemment triomphe. Mais c'est aussi à cette époque que sont clairement posés un certain nombre de problèmes qui rendront possible la pensée de l'astragale.
INTRODUCTION : L'humain par ses limites, Gil Bartholeyns, Pierre-Olivier Dittmar, Thomas Golsenne, Vincent Jolivet, Misgav Har-Peled
PRÉAMBULE
Fabrications grecques de l'humain. Identités de l'homme civilisé et cultures des autres,
Claude Calame
ADAM
Folie et renoncement à soi. L'apparition du saint homme dans l'Orient chrétien, Agnès Bellanger
Entre le boeuf et l'âne. Réflexion sur la machine dialogique, Misgav Har-Peled
L'homme au risque du vêtement. Un indice d'humanité dans la culture occidentale, Gil Bartholeyns
Nature adamique et nature déchue. Une culture qui ne dit pas son nom, Vincent Jolivet
Le propre de la bête et le sale de l'homme, Pierre-Olivier Dittmar
De la merveille à la connaissance. Vocation anthropologique de la narration médiévale, Jean-Jacques Vincensini
Conquête du monde, enquête sur l'autre et quête de soi. Alexandre le Grand au Moyen Âge,
Maud Pérez-Simon
L'ASTRAGALE
« L'homme est la mesure de toutes choses » (ou comment l'humanisme de la Renaissance est fondé sur deux malentendus), Thomas Golsenne
La parade amoureuse. Rituel érotique et événement esthétique dans l'Italie de la Renaissance, Bertrand Prévost
L'humain est-il encore un objet anthropologique ? Francis Affergan
Humains et animaux : la construction de la nature et de la culture, de l'identité et de l'altérité, Annamaria Rivera
« Non-human primates », Frédéric Joulian