Jean Renoir (1894-1979) reste l'un des cinéastes les plus admirés dans le monde pour des films comme La Grande Illusion et La Règle du jeu. On oublie que sa carrière ne s'est pas limitée au cinéma et qu'elle a toujours été imprégnée par l'écriture, d'abord celle de scénarios méticuleusement façonnés. Il a aussi nourri une abondante correspondance, archivée à partir des années quarante lorsqu'elle acquiert une importance existentielle lors de l'exil aux États-Unis. Elle nous donne à lire la chronique de la création de certains films, et forme aussi une interface de divers discours. À partir des années cinquante, Renoir devient dramaturge, puis biographe de son père et enfin romancier.
À travers son oeuvre et l'aspect apparemment hétéroclite de ses chansons et poèmes, Georges Brassens non seulement raconte des histoires, mais construit un univers. Il y a un « monde de Brassens » avec ses personnages mis en scène comme au théâtre, ses intrigues, son bestiaire, ses décors, ses lieux, ses images, ses valeurs, ses concepts, sa langue. Cette intention n'existait sans doute pas au départ dans son esprit, mais au bout du compte, le corpus une fois bouclé, le public éprouve la sensation irremplaçable que la juxtaposition des textes finit par constituer un tout, une sorte de « roman ».
Plus de 500 entrées, constituées essentiellement de noms propres, rendent compte de ce foisonnement. De A comme Abélard à Z comme Zanzibar, laissons-nous entraîner dans le sillage de l'auteur-compositeur, de la Camarde à la Camargue, de Paris à Sète, de l'Auvergnat à Jeanne, de Dieu à Cupidon et Vénus, du Gorille à Margot, de Valéry à Villon, de Brel à Tino, de l'Évangile à Ève, du Cimetière marin à la Mort, de Fernande à Mélanie, de Cythère à Don Juan.
Ce dictionnaire s'adresse à tous ceux qui souhaitent se plonger ou se replonger dans la magie d'un univers réaliste et surréaliste à la fois, où les portraits les plus truculents côtoient onirisme et poésie. Quarante ans après la disparition de Brassens, cet ouvrage prouve, s'il en était besoin, que ses couplets sont toujours vivants et que ses chansons sont faites « non seulement pour être écoutées mais surtout pour être réécoutées ».
Directeur général des Arts et Lettres auprès d'André Malraux de 1959 à 1966, Gaëtan Picon ne cesse jamais d'être un critique des écrivains et des artistes. Alors que son Ministre veut partout, par les Maisons de la Culture, diffuser l'héritage total des productions du passé, il privilégie, en philosophe inspiré par Nietzsche, l'élan créateur de la génération des René Char ou Jean D ubuffet. Inventeur d'une théorisation de la Culture contemporaine, il préconise un Musée d'Art moderne, renouvelé dans ses postulats intellectuels autant que dans ses structures. Hors du temps politique et à l'écart des recherches structuralistes, il se passionne pour l'interprétation de la genèse des oeuvres issue des ateliers de leurs auteurs. Dès lors, il configure les règles d'u ne critique "consciente", poétique et philosophique qui, par la densité d'un style à la fois sensualiste et abstrait, l'a cependant marginalisé dans les imaginaires sociaux.
Cette Introduction présente un choix de grands axes pouvant être mis à profit dans l'analyse de la musique tonale. L'auteur investit ces structures fondatrices à travers des regards sur Beethoven, Chopin, Schumann et au-delà ; de plus, il procède lui-même à une redéfinition du mode mineur. Ainsi, les différentes approches adoptées - théorique, analytique, méthodologique - s'entrecroisent afin de s'éclairer les unes les autres tout au long de huit chapitres devancés par des prolégomènes. Ce livre sera utile aux élèves des conservatoires, aux musicologues, aux interprètes, comme à toute personne désireuse d'articuler sensibilité et raison - saveur et savoir - à propos d'un corpus et d'un principe d'organisation représentatifs de la pensée musicale européenne. La bibliographie de l'ouvrage permettra au lecteur aussi bien d'approfondir sa connaissance de telle ou telle théorie ou méthode analytique que d'en découvrir d'autres.
Henri Gonnard, musicologue, est maître de conférences à l'université de Tours. Ses travaux portent d'une part sur la théorie et l'analyse de la musique occidentale, d'autre part sur les rapports de cette dernière avec la littérature, les autres arts et l'histoire des idées, du romantisme au surréalisme. Les compositeurs qu'il a le plus étudiés sont Schumann et ceux de la première moitié du XXe siècle, Debussy en particulier (presses de l'université de Paris- Sorbonne et de celle de Grenade, éditions Leo S. Olschki, Cahiers du CIREM, Musurgia, etc.). Chez Champion, il a déjà publié La musique modale en France de Berlioz à Debussy.
Entre les derniers sursauts de l'Empire et les monarchies qui tentent désespérément de se survivre, Élisabeth Vigée Le Brun laisse un recueil de ses Souvenirs, à mi-chemin des mémoires et de l'autobiographie, dans lequel elle élabore un ultime autoportrait. Dans une période où les mémoires d'artistes sont encore rares, la longévité du peintre (1755-1842) lui a donné l'occasion d'élaborer un récit de vie à un moment où la représentation de l'identité de l'artiste est en pleine mutation. Élisabeth Vigée Le Brun ne sort pas de l'ombre pour prendre la parole mais s'exprime à partir de sa propre renommée. En Italie, en Autriche, en Russie, en Angleterre, elle est devenue la portraitiste de l'Europe. Le lecteur des Souvenirs se trouve ainsi en présence de mémoires d'une « célébrité » publiés du vivant de leur auteur. Les Souvenirs sont un récit de conquête. Mais à peine la première réputation de l'artiste est-elle établie et sa place institutionnelle assurée, que la Révolution lui en ravit les fruits : tout ou presque est à reconstruire. Sur un fond d'insécurité matérielle, Élisabeth Vigée Le Brun lutte pour retrouver, dans un champ nouveau, un espace pour sa peinture, condition même de sa survie économique. La grâce qui nimbe ce tour de force ne dissimule pas la détermination et la ténacité exceptionnelles de l'artiste. Cette édition se fonde sur l'unique texte cautionné de son vivant par l'artiste. Elle est complétée par les «Conseils sur la peinture du portrait» et par une lettre « sur les bruits » adressée à la princesse Natalia Kourakina.
De fortes césures politiques - révolutions, coup d'État - marquent les années 1829-1870. L'activité théâtrale se ressent de ces soubresauts et connaît ses propres batailles ou ses scandales, d'Hernani à Tannhäuser. Dans la fièvre des mélodrames romantiques puis dans la « fête impériale », on se plaît à briser les formes, à en inventer de nouvelles : voici le « drame-ballade », la « féerie-pantomime-arlequinade » ou même la « tragédie étrange », sans compter d'autres extravagances. C'est un âge d'or du spectacle.
Pendant cette période, les écrivains cherchent à gagner un peu d'autonomie dans les théâtres en fondant la SACD, ou encore, comme le font Hugo et Dumas, en prenant la direction d'une salle. Naissent aussi les premiers rêves de théâtre populaire, de festivals, et bientôt l'aspiration à un théâtre d'art délivré des contraintes financières.
Penser la musique à travers ses rapports problématiques avec le mouvement surréaliste, tel est le propos du présent ouvrage. Ce détour est une manière de « faire parler » un choix de compositions qu'il met par là à distance, le cas échéant, du néoclassicisme. Mais celles-ci contribuent inversement à montrer la fécondité d'une aventure de l'esprit qui, non contente de tirer son nom de la qualification donnée par Apollinaire à une oeuvre dans laquelle la musique prend part - Parade (1917) d'Erik Satie -, est toujours agissante en tant que « centre et absence » du Marteau sans maître (1955) de Pierre Boulez et au-delà.
Le père jésuite Louis-Bertrand Castel (1688-1757) a connu son heure de gloire au XVIIIe siècle grâce à son fameux clavecin oculaire. Partant de l'idée qu'il existe une analogie physique entre le son et la couleur, Castel imagine un clavecin qui dispenserait une musique de couleurs - des couleurs préalablement organisées en gamme sur la base de leurs correspondances naturelles avec les sons. Par-là, Castel cherche à mettre au jour les principes rationnels qui déterminent l'ordre de la nature et à fonder l'art en raison. Dès lors, l'art en vient à témoigner d'une intelligence divine compatible avec la raison et la musique des couleurs. En ce qu'elle rend ces principes fondateurs plus visibles que tout autre art, elle s'apparente à une forme de révélation. La musique colorée permet en outre de sauver l'homme de l'ennui en assurant la pérennité du mouvement et de la surprise, en renouvelant le plaisir de la variété, en satisfaisant l'inconstance naturelle qui le pousse vers d'autres objets de plaisir. De là à promouvoir un art libertin, il n'y a qu'un pas, que Castel franchit à son insu.
Félix Mendelssohn Bartholdy (1809-1847), compositeur majeur de la période romantique, est un grand orchestrateur et l'auteur d'une oeuvre sacrée conséquente. Il est à l'origine du genre des Romances sans paroles, sorte de lied muet où la voix laisse sa place au piano. Pourtant, sa musique reste sous-estimée : Debussy n'a vu en lui qu'un « notaire facile et élégant ». C'est aussi une personnalité complexe, dotée d'une grande intelligence et d'une vaste culture. Ami intime de Goethe avec lequel il entretiendra des relations privilégiées, Mendelssohn est, comme on l'ignore souvent, un versificateur émérite, traduisant aussi facilement des textes de Dante que de Platon. Cette étude se propose de rassembler un corpus cohérent des poésies et des traductions de Mendelssohn, et de penser l'intention esthétique du compositeur à travers le prisme de sa culture littéraire afin de nous poser la question de l'auctorialité et de la légitimité de lui attribuer le titre de poète.
Mendelssohn n'a jamais incarné la figure tourmentée du compositeur romantique, et sa musique n'a sans doute pas obtenu la renommée qu'elle mérite. Mais il reste un génie sobre, un artiste accompli et exemplaire, dénonçant à demi-mot la frontière bien trop souvent franchie par les musiciens, entre passion littéraire et vocation musicale.
Dans la littérature et dans la critique, le thème du double jouit d'une longue tradition. Les contributions réunies dans cet ouvrage ne prétendent pas nier une telle tradition. Elles se proposent toutefois de lui apporter des compléments, sinon des renouvellements, en envisageant des approches et des objets qui échappent aux perspectives usuelles de cette tradition. Du posthumain au sosie du souverain, en passant par un retour critique sur le fantastique, les différents essais offrent, à travers la littérature et le cinéma, un éclairage neuf sur la duplicité, sur ses enjeux anthropologiques, fictionnels, ontologiques et représentationnels. Le thème du double est lu sous le signe de son actualité, aussi bien celle des questionnements qu'il porte que celle de la critique qu'il appelle.
Contributions de : Jean Bessière (Université Sorbonne Nouvelle - Paris III), Amaury Dehoux (Université catholique de Louvain/FNRS), Erica Durante (Université catholique de Louvain), Louise Flipo (Université catholique de Louvain), Massimo Fusillo (Université de L'Aquila), Carl Havelange (Université de Liège/FNRS), Maude Havenne (Université catholique de Louvain/FNRS), Dominique Lambert (Université de Namur), Marie-Valérie Lambert (Université catholique de Louvain), Patrick Marot (Université de Toulouse II-Jean Jaurès), Denis Mellier (Université de Poitiers), Thibaut Vaillancourt (Université catholique de Louvain/Université de Lausanne). Sous la direction de Erica Durante et Amaury Dehoux.
Pensés à l'orée du XIXe siècle comme des outils de fixation, d'expansion et d'investigation scientifique du lexique et de la nomenclature de la musique, les deux volumes Musique de l'Encyclopédie méthodique de Panckoucke s'inscrivent dans une perspective critique du Dictionnaire de musique de Rousseau et de l'Encyclopédie. Publiés longtemps après l'impulsion initiale du projet et à vingt-sept ans d'écart, ils ne rencontrèrent aucun succès.
La polyphonie et le jeu d'intertextualité que développent les personnalités des trois éditeurs et principaux rédacteurs (Framery, Ginguené et Momigny) offrent aujourd'hui à dix chercheurs une inestimable source pour l'étude des discours sur la musique en France à la charnière des Lumières et du romantisme.
Sous la direction d'Alban Ramaut et Céline Carenco. Téxtes réunis par Béatrice Didier et Emmanuel Reibel.
Sous la direction de Emmanuel Reibel et Béatrice Didier.
Hector Berlioz publie en 1843 un Grand Traité d'instrumentation et d'orchestration modernes dont il donne une édition augmentée de « L'art du chef d'orchestre » en 1855 : il y manifeste de façon éclatante sa créativité de musicien et d'écrivain. Ce volume tente de montrer l'originalité de sa démarche à une époque où la facture instrumentale se développe considérablement, mais où Berlioz est presque l'un des seuls à mener en France une réflexion d'ensemble sur l'orchestre. Dans ce texte surprenant, où se mêlent rêve utopique sur l'orchestre idéal et conseils très précis livrés aux instrumentistes et aux chefs, envolées lyriques et analyses d'exemples musicaux, l'orchestre apparaît comme un vaste théâtre où se joue l'avenir de l'art. Livre de chevet de plusieurs musiciens français, de Camille Saint-Saëns à Maurice Ravel, l'ouvrage est mieux accueilli encore à l'étranger, en Russie, en Allemagne et en Angleterre. Ce traité riche en perspectives sur la musique et la société futures concerne-t-il encore les musiciens de notre temps ? C'est ce qu'interroge cet ensemble d'études qui, nous l'espérons, ne manque pas d'actualité.
Depuis sa naissance, avec l'Orfeo de Monteverdi, en 1607, l'opéra, au cours des XVIIe et XVIIIe siècles, puise la quasi-totalité de son inspiration aux sources de la mythologie ou de l'histoire gréco-latines. Dépourvu de toute résonance à la politique royale, il apparaît alors comme un simple divertissement, propice à l'utilisation des dernières innovations en matière d'artifices scéniques. La fin du XVIIIe siècle qui, dans le sillage des Lumières, apporte une réflexion plus idéologique sur le pouvoir monarchique, voit l'émergence de la thématique historique, européenne et française, dans les livrets d'opéra. Désormais, et surtout au XIXe siècle, l'opéra va trouver son inspiration dans les grands événements qui ont secoué l'Europe depuis les Croisades, dans les vies de personnages illustres, Marie Stuart, Jeanne d'Arc entre autres, qui vont devenir les héros d'un genre qui s'adapte aussi, au moment de la Restauration, à la naissance de l'analyse historique et au besoin de retrouver des racines authentiquement européennes, ce dont témoigne dans les arts le style Troubadour qui va fournir aux mises en scène d'opéra une grande source d'inspiration.
L'esprit du surréalisme a soufflé bien avant les années 20 du XXe siècle, si l'on prend en compte ses exigences premières : dénier à la Raison raisonnante, dite raisonnable, de s'ériger en norme ; penser toutes les conduites humaines ; faire confiance au désir (d'être et d'aimer) ; tenter de reconstruire des liens sociaux plus justes. Il n'est pas inutile pourtant de rappeler les étapes d'une histoire qui a vu un groupe de poètes souder leurs efforts pour défendre " la" poésie : ancrée dans un arrière-pays balayé par de profondes tensions créatrices, riche des découvertes psychanalytiques, riche d'un horizon scientifique bouleversé par les sciences physiques ; polarisée par le rêve d'une évolution sociale mondiale. Breton, Aragon, Éluard, Soupault... ont inventé ainsi, par leur exigence, un monde auquel ils apportent des couleurs jamais vues. Ils ont appelé de leurs voeux une expression artistique qui suivrait la même "route mystérieuse où la peur à chaque pas nous guette": Max Ernst, Masson, Dalí, Matta... se sont reconnus dans ce pays de l'étrange, où les exigences formelles ou techniques ne sont pas conditions mais conséquences d'un grand art. Quel songe alors les traverse ? Dans ce milieu d'une richesse inouïe, se nourrit tout un courant de la poésie et d'art tout à fait contemporain.
Lire un polar, regarder un film d'auteur, interpréter une partition, représenter des paysages naturels ou mentaux relèvent de routines dont on ne s'étonne plus guère. Pourtant, cette familiarité avec les oeuvres d'art laisse intacte l'énigme répétée que constitue l'expérience esthétique, c'est-à-dire la rencontre entre des producteurs et des consommateurs, des auteurs et des spectateurs, des créateurs et des publics, autour de ces objets singuliers. Des logiques très diverses portent les uns à s'exprimer, à produire, à créer et les autres à contempler, à lire, à écouter. quand d'autres encore commentent, classent, éditent, produisent, répertorient.
Les analyses proposées sondent l'historicité de ces rapports aux oeuvres. Elles déconstruisent les catégories impliquées dans les manières de faire de l'art, de le pratiquer, de l'apprécier et de le juger. Elles explorent les formes de subjectivité qui se cristallisent dans cette expérience. Elles tentent aussi d'expliciter ce qui rend possible une telle communauté d'expérience, parfois résumée à des " langages de l'art ". Comprendre comment " ça " communique suppose en effet que soit esquivé le piège de l'abstraction et du formalisme auquel se heurtent les approches inspirées par la linguistique et la phénoménologie, mais il faut aussi que soit déjoué l'écueil du repli positiviste sur la seule explicitation de logiques sociales coupées du vécu propre à cette expérience.
Bel exemple de collaboration transdisciplinaire et internationale, le présent volume met en valeur la grande variété de la production musicale de Villa-Lobos, le plus célèbre compositeur brésilien : de la guitare au piano, en passant par l'orchestre et l'écriture vocale (mélodie, chant choral, opérette.). Tout à la fois réflexion sur l'interprétation et sur le devenir de l'oeuvre, fondé sur des disciplines variées (allant de l'histoire à la sémiotique existentielle) et les découvertes les plus récentes, il devrait s'imposer comme une irremplaçable synthèse en langue française, marquant le cinquantenaire de la disparition de ce musicien.
Aborder les rivages d'un paysage sonore méconnu ou ignoré peut apparaître comme une ambition inutile ou disproportionnée.
Pourtant, le présent ouvrage a voulu entreprendre l'histoire d'un corpus dont l'étude, même partielle, n'a jamais été commencée. Des précurseurs aux bâtisseurs, des Cinq Rechants d'Olivier Messiaen à Swan Song de Maurice Ohana, l'ensemble vocal a cappella se décline en strates successives, sujet de nouveaux enjeux techniques, témoin des esthétiques naissantes, parangon d'explorateurs passionnés que cent soixante illustrations révèlent.
Par-delà cette mosaïque colorée de petits chefs-d'oeuvre, s'ébauche une réflexion sur l'esthétique musicale après 1945 : passant outre les a priori culturels, de la recherche du timbre vocal à l'équilibre entre son et sens, la diversité de traitement du genre offre l'ébauche d'une synthèse et profile l'axe d'une directionnalité. Même si depuis Auschwitz et Hiroshima il est des oeuvres défigurées, cris d'angoisse et de révolte, jamais la musique n'a été moins inhumaine - parce qu'elle s'inscrit dans l'histoire des hommes, ni moins frivole - car elle est le lieu d'expression des terreurs et des joies du monde.
Aussi, l'ensemble vocal a cappella reflète-t-il la recherche d'un dynamisme musical qui, de toutes ses forces, tend vers son accomplissement à travers une beauté tour à tour outragée et transfigurée.
Francisco Pacheco (ou Francisco Pérez del Río, Sanlúcar de Barrameda, 1564 - Séville, 1644) est un peintre maniériste réputé pour avoir été le maître et le beau-père de Diego Velázquez de Silva. Artiste savant d'excellent niveau et dessinateur de talent, il demeure l'auteur d'un des trois traités de peinture du Siècle d'Or espagnol : L'Art de la Peinture, rédigé de 1619-20 à 1638. Jusqu'ici partiellement traduit en français, ce texte s'avère un véritable pensum, source incontournable de références tant dans le domaine artistique que pour l'histoire des mentalités. Injustement dénigré, Pacheco révèle par sa grande honnêteté intellectuelle et morale toute la portée de son analyse de l'art de peindre, parfois d'une brûlante actualité.
D'après une des rares éditions originale (Séville 1649). Traduction, présentation et notes par Jean-Louis Augé.