Kamal Achour, d'origine tunisienne, enseigne les mathématiques dans une université parisienne. Il a soixante ans et mène une vie bourgeoise avec sa femme française, Brigitte, dans un immeuble où les résidents sont de nationalités diverses et ont des occupations fort disparates. Au cinquième étage habite une Tunisienne, Zohra, qui travaille occasionnellement comme femme de ménage pour nourrir sa petite famille : un mari aux moeurs étranges et un enfant handicapé. Fier de son ascension sociale, méprisant vis-à- vis de ses anciens compatriotes, Kamal ne peut pourtant s'empêcher de sympathiser peu à peu avec Zohra et, tout à son jeu de séduction, finit par tomber amoureux d'elle. Son rêve le plus cher, à elle, est de rentrer en Tunisie...
S'inscrivant avec finesse et humour dans le microcosme d'un immeuble comme il y en a tant à Paris, ce roman aborde subtilement les questions brûlantes de l'immigration et de l'acculturation, à travers un personnage tout en ambivalences. La Voisine du cinquième a obtenu le prestigieux prix Katara en 2021.
Roman initiatique dont le héros, Ibn Fattouma, révolté par la corruption qui règne dans son pays et encouragé par son maître spirituel, se décide à partir à la recherche d'une cité lointaine, réputée vertueuse, dite Dâr al-Jabal, la Demeure de la Montagne.
Après avoir bourlingué à travers le monde, Zakaria Moubarak rentre dans son village natal, à l'est de Beyrouth. Quelques mois plus tard, on découvre son cadavre dans le terrain hérité de son arrière-grand-mère. L'enquête explore plusieurs pistes, de la vendetta familiale au règlement de comptes mafieux lié à une toile - volée à une ancienne maîtresse - qui serait un original de Chagall. Empreint d'un irrésistible charme cosmopolite, ce formidable roman, le septième de l'auteur, distille le mystère tout en déployant une foisonnante chronique libanaise.
Au début du XIXe siècle, dans un quartier populaire du Caire, des relations de voisinage et d'amitié se nouent entre trois hommes : Yazid, dont les parents ont péri à Alexandrie lors de l'invasion des troupes de Bonaparte ; 'Ata, qui vient de se marier avec une jeune femme d'origine maghrébine ; enfin, le cheikh Qalyoubi, enseignant à la mosquée-université d'Al-Azhar.
Les trois amis vivent ensemble les péripéties de l'expédition française, surtout les deux révoltes du Caire, puis la prise du pouvoir par Muhammad Ali, l'officier albanais qui va entreprendre la modernisation de l'Egypte. Mahfouz nous conte l'histoire des descendants de ces trois personnages jusqu'à la fin du XXe siècle. A travers eux, c'est la société égyptienne tout entière qui nous est restituée, avec ses luttes de classes, ses conflits de générations, ses métamorphoses, mais aussi son identité irréductible.
Ce roman, l'avant-dernier de Mahfouz, est un feu d'artifice offert à ceux qui l'ont accompagné fidèlement tout au long de sa carrière. Il se présente sous la forme d'un dictionnaire biographique où les personnages sont classés par ordre alphabétique, sans le moindre souci chronologique. Trois arbres généalogiques se dessinent ainsi, peu à peu, comme un puzzle, et leurs branches s'entrelacent pour former une fresque qui parachève aussi bien le cycle réaliste de l'auteur que ses romans et nouvelles écrits sous le choc de la défaite de 1967.
Jawad est le fils cadet d'une famille chiite de Bagdad. Son père le prépare à exercer la même profession rituelle que lui, celle de laver et de préparer les morts avant leur enterrement. Mais Jawad s'y refuse et rêve de devenir sculpteur «pour célébrer la vie plutôt que vivre avec les trépassés».
Alors que Louis paît tranquillement dans son pré, une couronne portée par le vent atterrit à ses pieds. Le mouton pose la couronne sur sa tête, se dresse sur ses pattes arrière et prend une branche comme sceptre. Et c'est ainsi que Louis devient Louis Ier, roi des moutons, et qu'il se laisse griser par l'ivresse du pouvoir. Parties de chasse au lion, promenades dans les jardins royaux... Puis, dans sa folie des grandeurs, le bon roi se transforme en despote à coups de marches militaires et de mesures ségrégationnistes. Jusqu'à ce que le vent remporte sa couronne... qui atterrit cette fois-ci aux pieds du loup !
Une fable animalière irrésistiblement drôle (et philosophique) pour aborder la grande question du pouvoir et ses dérives, superbement mise en images.
Reclus dans une chambre d'hôtel, un écrivain dénommé Monsieur N. ressasse les souvenirs de son enfance malheureuse. La femme qu'il a vraiment aimée l'a quitté, et il vient de constater que les pages qu'il a écrites pour se défouler depuis qu'il est à l'hôtel ont disparu. Hanté par le héros de l'un de ses romans, un tueur, il parcourt les bas-fonds de Beyrouth à sa recherche, le retrouve, mais le fuit précipitamment, paniqué à l'idée que l'autre le reconnaisse. Tout se confond dans sa mémoire : les événements vécus, les intrigues de ses romans, les rêves et les cauchemars... Qui est finalement ce mystérieux Monsieur N. ? On ne le saura qu'à la toute dernière page de ce roman haletant, certainement l'un des plus prenants et des plus ingénieux publiés en arabe ces dernières années.
Nelson part à l'étranger pour rencontrer sa correspondante. À peine arrivé, il constate à quel point les habitants de ce pays sont d ifférents de lui. Il a l'impression d'être entouré par les êtres les plus étranges qui soient - des monstres ?
Au fil des aventures du jeune Nelson, une réflexion pleine de finesse et d'humour sur la différence et la rencontre de l'étranger.
Anthologie puisée dans quatre recueils de poèmes dont la publication s'est étalée de 2009 à 2019 : "Un billet pour deux" (2009), "Prière pour le début du gel" (2014), "Métaphysique du renard" (2016), "Le deuil ne porte pas de couronne"(2019). Accablé au cours de ces années par la disparition, l'un après l'autre, de ses proches amis, notamment le poète Bassam Hajjar (auteur de "Tu me survivras") et l'écrivaine et éditrice Mayy Ghoussoub, et grièvement blessé lui-même dans un accident de la route qui l'a plongé deux semaines dans le coma, le poète donne libre cours dans ces recueils au même sentiment de perte, mais avec des tonalités très variées allant du cri de douleur à la méditation métaphysique chuchotée. Il confirme de nouveau sa place parmi les plus grands poètes arabes contemporains.
Sous ce nom (le Fou, ou le Fou de Laylâ : Majnûn Laylâ) se cache un jeune homme, Qays ibn al-Mulawwah, qui n'a peut-être jamais existé. D'entrée de jeu, il s'agit d'un inextricable duo entre histoire et légende. La première nous dit qu'au désert d'Arabie, dans la seconde moitié du VIIe siècle, circulent des poèmes chantant un amour parfait et impossible. Leurs auteurs, sous divers noms, se veulent, d'une tribu à l'autre, les meilleurs dans le genre, et pour avoir vécu cet amour, et pour le dire.
La légende, elle, nous parle d'un jeune homme, Qays, de la tribu des Banû 'Amir, qui tombe amoureux de sa cousine Laylâ. Tout devrait concourir à leur bonheur : ils n'ont aucune crainte quant à l'accord de leurs familles, portées, comme les autres, à ce type de mariage entre cousins. Mais voilà... Qays est poète, et il décide de chanter son amour à tous vents. Ce faisant, il enfreint une règle majeure du code bédouin. Dès lors, tout s'enchaîne : le refus de la famille, le mariage forcé de Laylâ, son départ de la tribu, Qays sombrant dans la folie et allant vivre avec les bêtes du désert, sa mort enfin, d'épuisement et de douleur.
Quel qu'en soit l'arrière-plan social, la légende crée un mythe : celui de l'amour parfait et impossible. De tous les poètes qui l'ont chanté dans l'Arabie de ce temps, Majnûn est sans doute le plus grand. Homme de chair et de sang, ou personnage inventé, il fixe au poème un unique sujet : l'amour dans toutes les variations possibles.
Ce livre rassemble différents articles de Nawaf Salam sur le système politique libanais, réécrits et augmentés de nouvelles réflexions à la lumière, notamment, de la crise des deux dernières années - crise qui menace l'existence même du pays.
Un livre incontournable savant et savoureux, sur la composition et le déroulement du repas épicurien libanais.
Autobiographie imaginaire d'un artiste-peintre, Chehab al-Chamandar (1958-1918) qui, à soixante ans, juste avant sa mort, se décide à raconter son itinéraire depuis son enfance dans une famille au passé politique glorieux. Défile ainsi sous nos yeux, en une trentaine de séquences portant chacune le titre d'un de ses tableaux, la vie tumultueuse d'un homme avide de tous les plaisirs, la sensibilité à fleur de peau, avec ses enthousiasmes, ses doutes, ses innombrables aventures amoureuses et surtout sa passion dévorante pour l'art moderne. Fort différent de «Taxi» ou de «L'Arche de Noé», tant par le milieu social qu'il explore que par sa construction et son style, ce roman foisonnant sur les affres de la création artistique est probablement le seul du genre - ou l'un des très rares - dans la littérature arabe.
Pendant de longues années, Najla Jraissaty Khoury a sillonné le Liban afin de constituer le corpus le plus exhaustif possible des contes populaires libanais. Le présent ouvrage rassemble trente de ces contes, des histoires de femmes, racontées par des femmes à l'adresse d'autres femmes. On y retrouve la faconde des conteurs, la sagesse féminine, et de l'humour à toutes les pages...
Une jeune écrivaine égyptienne, Enayat El-Zayyat, s'est donné la mort en 1963, et personne ne se rappelle plus de son seul et unique roman, «L'Amour et le Silence», publié en 1967. Plus de quarante ans plus tard, Iman Mersal l'a lu et, intriguée par le suicide de son auteure, a mené une longue et minutieuse enquête pour reconstituer son histoire. Un livre inclassable, entre la biographie, l'enquête historique et journalistique ou encore l'essai, superbement écrit par Iman Mersal dont la prose se révèle aussi forte et émouvante que sa poésie.
Après six ans de séjour en France, où il a obtenu un diplôme d'études cinématographiques, le narrateur décide de rentrer au pays. Dès son arrivée à l'aéroport de Damas, il est arrêté par la police politique et conduit dans un bâtiment sinistre du centre-ville, appartenant aux Services de renseignements. Là, il est violemment frappé avant d'être accusé contre toute vraisemblance, lui, le chrétien grec-catholique, d'être membre du mouvement des Frères musulmans. Quelques jours plus tard, il se retrouve dans la gigantesque et terrible prison du désert, en compagnie de milliers de détenus. Commence alors son calvaire qui va durer treize ans... Ce récit, qui se présente comme un journal, restitue sous une forme légèrement romancée les choses vues et entendues par Moustafa Khalifé durant son long enfermement dans les prisons syriennes. Les scènes se succèdent, d'autant plus insoutenables qu'elles sont décrites sobrement sans vaine rhétorique ni pathos. Elles donnent à voir, non seulement la barbarie des geôliers, mais aussi le processus de déshumanisation des détenus et, au-delà, de toute la société.
Vingt siècles de l'histoire de l'humanité sont ici évoqués en fonction de leur rapport à la plus modeste des Légumineuses : le pois chiche. Avec une bonne centaine de recettes, glanées autour de la Méditerranée, mais aussi en Iran et en Inde, et des commentaires alliant érudition et humour.