Le manuscrit porte sur un sujet rarement analysé avec profondeur, à savoir le rapport des féministes à l'éducation et l'apport des théories féministes aux théories de l'éducation, qui est un enjeu central pour une politique féministe d'émancipation. Il montre différentes stratégies historiques, mais surtout s'attache à montrer comment la théorisation féministe nourrit une critique aussi bien de la forme de l'enseignement que de son contenu et de sa place dans la société, critique qui vient nourrir le projet féministe de transformation social au-delà de l'éducation. En s'inspirant des théories du care l'ouvrage propose donc d'utiliser les théories féministe de l'éducation pour repenser la pensée transformative du féminisme.
Le plaisir est le sujet de ce livre. Plaisir de s'approcher du tableau pour en voir les détails, traces du désir du peintre dans son oeuvre, plaisirs et désirs de mieux y voir. « Comment regarder les tableaux pour y voir la peinture ? » La question est au coeur de la pratique de l'histoire de l'art de Daniel Arasse.
Il se trouve qu'Arasse n'a jamais écrit d'ouvrage purement théorique. Il n'aimait pas, disait-il, la pure théorie. Or un livre, L'art dans ses oeuvres. Théorie de l'art, histoire des oeuvres, était en préparation lors de sa disparition, et entendait combler cette lacune. Il en reste une esquisse : la maladie de Charcot, diagnostiquée en décembre 2001, a empêché l'historien de publier ce traité. Sa méthode - si méthode il y a - n'a donc jamais été explicitée. Il est vrai que, pertinente sur le plan de l'interprétation comme sur celui de l'iconographie, l'histoire de l'art arassienne ébranle les fondements de la discipline, mobilisant des outils nouveaux qui suscitent un retournement de l'interprétation. Une révolution copernicienne de l'histoire de l'art est à l'oeuvre dans ses textes. Et c'est l'originalité et les enjeux de ces plaisirs de peinture que ce livre met en lumière.
Le récent divorce d'une partie de la gauche avec le legs rationaliste, universaliste et progressiste des Lumières peut donner le sentiment que l'émancipation au sens moderne n'a qu'un lointain rapport avec ce qu'elle signifiait au XVIIIe siècle, voire qu'elle lui est franchement opposée. Le présent ouvrage entend revenir sur un lien historique parfois remis en question de nos jours : les cas de Babeuf, de Mary Wollstonecraft et de Toussaint Louverture rappellent que les principes fondateurs de toute perspective de transformation sociale trouvent leur source dans la Révolution française.
Les grands débats de la gauche des XIXe et XXe siècles, de la Révolution russe aux luttes d'indépendance des peuples colonisés, de Marx à Sartre et de Kropotkine à C. L. R. James, confirment le lien identitaire des plus grandes figures de la gauche avec le message libérateur du siècle des Lumières.
Comment envisager les effets subjectifs et corporels produits par le sexisme et le racisme ? En quoi les catégories de race et de genre organisent-elles l'expérience ordinaire - y compris dans ses dimensions non réflexives, affectives ou intimes - et dans quelle mesure configurent-elles le rapport au monde, aux autres et à soi ? Quelles implications normatives et politiques sont mises au jour dès lors que les rapports de race et de genre sont envisagés, non comme des événements ponctuels dont la violence serait paroxystique, mais comme des structures de l'expérience quotidienne ou banale ?
En élucidant l'expérience vécue des rapports de race et de genre depuis le point de vue des personnes concernées, la phénoménologie critique s'affirme depuis plusieurs années comme un renouvellement radical des problématiques qui guident la philosophie politique et sociale. Elle prend appui sur les travaux fondateurs de Simone de Beauvoir et de Frantz Fanon, pour proposer une relecture du canon phénoménologique - ses modes de description, ses objets, méthodes et concepts - et envisager les déplacements que les expériences minoritaires induisent.
Elle redéfinit ainsi les outils de l'épistémologie sociale en comprenant les rapports sociaux de genre et de race au prisme des expériences qu'ils constituent : la manière dont ils configurent les corps et subjectivités, orientent le rapport au monde et aux autres ou modèlent la perception. Par un double diagnostic - la race et le genre produisent des effets réels et matériels dans l'expérience vécue, mais cette réalité n'implique aucun fondement nécessaire - la phénoménologie critique articule transformation sociale et transformation de soi en dessinant d'autres expériences politiques possibles.
Alors que la phénoménologie critique est encore peu connue en France, cet ouvrage collectif témoigne de la fécondité d'une telle approche, tout en reconnaissant la pluralité des démarches qui s'en revendiquent. Il réunit des travaux de philosophes pour interroger la transformation de la phénoménologie par la critique sociale, les dimensions politiques de l'expérience personnelle, et les possibilités de faire de l'expérience de la domination la matière même de sa transformation.
Contributions de Marion Bernard, Magali Bessone, Alexandre Féron, Camille Froidevaux-Metterie, Marie Garrau, Mona Gérardin-Laverge, Johanna Oksala, Mickaëlle Provost, Matthieu Renault ;
C'est en 1934, devant un parterre de psychologues, que Marcel Mauss énonce sa célèbre conférence «?Les techniques du corps?». L'enjeu est de taille car il s'agit de démontrer 1- que les gestes techniques sont une coordination de différents mouvements du corps organisés en vue d'obtenir un résultat et une certaine efficacité, 2- que les actes techniques sont valorisés par le groupe dans son ensemble, car c'est lui qui les reconnaît comme efficaces physiquement, socialement et matériellement, et 3- que le social s'insère au plus profond de l'individu non pas uniquement pour le déterminer négativement, mais aussi pour l'adapter aux différents changements de la vie sociale.
En proposant cette nouvelle hypothèse, Mauss fait du corps un objet central pour la réflexion anthropologique.
Dans ce livre, Jean-François Bert, spécialiste de Mauss et de l'histoire de l'anthropologie française, propose une nouvelle édition commentée de la conférence de Mauss ; il retrace aussi l'histoire de sa réception et de sa diffusion en proposant un recueil des différents textes écrits à partir des années?1950 qui utilisent, discutent ou précisent les nombreuses hypothèses de l'anthropologue.
La décolonisation de l'Afrique occidentale française marque-t-elle une rupture ? C'est la question que pose ce livre. En plongeant dans cette histoire complexe, Nicolas Bancel propose une analyse articulant l'histoire politique et institutionnelle de l'AOF à l'histoire moins connue de la formation et de la politisation des élites ouest-africaines. Après 1945, une nouvelle génération devient l'avant-garde politique de l'anticolonialisme, malgré les tentatives des autorités coloniales de la contrôler. Au cours des années 1950, les syndicats se renforcent, la jeunesse entre en ébullition politique alors qu'apparaissent les premiers partis indépendantistes d'Afrique occidentale française, menaçant l'ordre colonial d'un front commun. C'est dans ce contexte que les indépendances sont négociées entre les autorités coloniales et la première génération de lettrés africains, leaders des partis politiques de masse. La nouvelle génération politique a perdu la partie ; pourtant, ses projets politiques et sociaux sont-ils si différents de ceux des autorités coloniales ?En suivant la formation intellectuelle et corporelle de cette élite, on comprend qu'un processus d'hybridation culturelle est à l'oeuvre. Ce processus se caractérise par l'incorporation de valeurs, de normes et de styles de conduite qui rapprochent ces anticolonialistes radicaux de leurs adversaires. Porteurs de valeurs et d'outils intellectuels venus d'Occident, ils engagent une concurrence mimétique avec l'Europe, caractérisant toute l'ambiguïté des décolonisations et ouvrant sur une nouvelle perspective pour appréhender la continuité des politiques coloniales menées après les décolonisations.Nicolas Bancel est historien, professeur ordinaire à l'Université de Lausanne (Suisse), au sein du Centre d'histoire internationale et d'études politiques de la mondialisation. Il est spécialiste d'histoire coloniale et postcoloniale et d'histoire du corps. Il a publié ou copublié récemment Le postcolonialisme (PUF, 2019) ; Décolonisations (La Martinière, 2020) ; Colonial Legacy (Indiana University Press, 2018) ; Sports in Postcolonial Worlds (Routledge, 2016).
Tirés à part n.m.
Extrait d'une revue ou d'un ouvrage relié à part en un petit livret.
Destiné habituellement à faire connaître un article récemment publié, la collection détourne l'usage et la fonction du tiré à part pour inviter à la (re)découverte d'un texte.
En lieu et place du traditionnel mot d'accompagnement de l'auteur, Éléonore Challine partage ici, dans une courte présentation, son expérience de traduction et de lecture de : "Reconsidérer la photographie érotique. Notes pour un projet de sauvetage historique" de Abigail Solomon-Godeau.
Le numéro 4 de Photographica propose de définir la notion de « productrices/producteurs de photographies », afin de prendre en compte des individus jusque-là peu considérés dans l'historiographie des images photographiques, alors même qu'ils participent pleinement à leur fabrique et à leur diffusion. Se plaçant « derrière l'image » plutôt que devant elle (Didi-Huberman, 1990), les contributrices et contributeurs du numéro analysent ainsi la façon dont les rapports de coopération, les luttes et les négociations, modèlent les photographies mises en circulation (Philippe Artières à partir d'un Objet de grève de Jean-Luc Moulène, Nicole Hudgins au prisme du genre des métiers de la colorisation des photographies au XIXe siècle, Marlène Van de Casteele étudiant les revendications auctoriales des employé.e.s du Vogue américain autour de 1940). Sous l'angle de l'histoire du travail, cette focale permet aussi d'envisager les espaces où se tissent les rapports des productrices et producteurs de photographies (la photothèque Hachette par Sylvie Gabriel, l'agence Roger-Viollet dans un entretien avec Delphine Desveaux). Parallèlement, cette notion conduit à reconsidérer la figure du photographe, lorsqu'il s'engage dans la gestion et la diffusion de ses images (Marie Durand et Anaïs Mauuarin, Agnès Devictor et Shahriar Khonsari). De cette façon, c'est le champ des objets photographiques offerts à l'analyse qui s'élargit, notamment à la photographie industrielle et commerciale. Généralement peu contextualisé, ce type d'images peut ainsi être situé dans une histoire sociale, économique et culturelle (Anne-Céline Callens), que les archives des conseillères sociales du travail, présentées par Chloé Goualc'h, pourront contribuer à étayer.
Les aveux de la chair, dernier volume de l'Histoire de la sexualité, fruit de près de huit ans de travail sur le christianisme ancien, est le livre auquel Foucault aura consacré le plus de temps, sans parvenir à l'achever complètement. Le détour par les Pères de l'Eglise (Tertullien, Augustin, Cassien, etc.) devait contribuer à éclairer le rapport que l'Occident entretient au corps et à ses plaisirs, au croisement de la subjectivité et de la vérité. Publiés posthumément en 2018, déjà traduits en plusieurs langues, Les aveux de la chair révèlent l'étendue des recherches conduites par Foucault sur les premiers siècles chrétiens, que les textes et les cours jusqu'ici connus laissaient à peine deviner.
Le présent ouvrage organise une rencontre inédite : les lectures "chrétiennes" de Foucault sont ici interrogées par seize historiens, philosophes et théologiens internationaux, spécialistes de cette période ainsi que de la pensée de Foucault. En quoi l'approche de Foucault renouvelle-t-elle la manière de lire les Pères? Permet-elle d'aborder autrement la question de la nouveauté apportée par le christianisme dans la culture antique ? Et comment cette nouveauté peut-elle faire sens en philosophie aujourd'hui ? Questions cruciales, non seulement pour l'histoire des idées, mais d'abord et avant tout pour la compréhension de notre actualité.
Les auteurs James Bernauer, Philippe Büttgen, Philippe Chevallier, Elizabeth A. Clark, Agustin Colombo, Frédérique Ildefonse, Laurent Lavaud, Laurence Le Bras, Paul Mattei, Bernard Meunier, Sébastien Morlet, Michel-Yves Perrin, Jean Reynard, Michel Senellart, Arianna Sforzini et Johannes Zachhuber.
En commentant l'actualité européenne à partir des seules sciences politiques, économiques ou juridiques, le risque est grand de réduire l'histoire de l'Union européenne à ce qu'est l'UE aujourd'hui. Cette approche court le risque d'une lecture téléologique et déterministe du processus d'intégration et, de surcroît, elle rabat l'histoire controversée de la construction européenne sur le seul discours hégémonique actuel. Or, à la naissance du projet communautaire, trois grands courants idéologiques s'affrontent dans leur vision du «?bon gouvernement?» de l'Europe?: personnalistes, fédéralistes et ordolibéraux ont tous élaboré une définition singulière de la démocratie?- communautaire pour les uns, populaire pour les autres, «?de marché?» pour les derniers. De cette synthèse impossible est née la crise politique qui agite l'Europe depuis une dizaine d'années. Ces tensions - qui font à la fois la richesse et la complexité du modèle démocratique communautaire - ne se comprennent qu'à la lumière des discours concurrentiels qui ont sédimenté le modèle politique actuel. La généalogie «?française?», c'est-à-dire personnaliste et communautaire, de la construction européenne est abordée dans la première partie de l'ouvrage. Étudiée dans la deuxième partie, la généalogie «?italienne?», hamiltonienne et populaire, porte le premier discours défendant une intégration par le «?peuple européen?». La généalogie ordolibérale et conservatrice de la construction européenne occupe la troisième partie de l'ouvrage. À partir des notions de «?constitution économique européenne?», de «?marché institutionnel?» et d'«?économie sociale de marché?», elle aborde le rapport complexe que la théorie ordolibérale entretient avec la démocratie.
Que dire encore aujourd'hui des Rois mages que nous reconnaissons sans difficulté en tête de caravanes chargées des richesses de l'Orient ? Et si ces Rois mages étaient en réalité venus d'Occident ? Si les Mages avaient été couronnés non dans leurs lointaines contrées, mais dans les royaumes de l'Europe féodale ?
Le livre propose de suivre le voyage des Mages à travers une tradition plus que millénaire, jusque dans les sculptures, peintures murales et vitraux des églises des Xe-XIIe siècles. À une étape de ce voyage, les magiciens païens ont reçu le plus haut insigne qui soit, la couronne royale. C'est en tant que rois et mages qu'ils prennent corps dans les consciences et dans les arts.
En scrutant toutes les modifications des images dans le temps, des plus remarquables aux plus inaperçues, et en les étudiant à la lumière des textes, du rituel et de la place des décors dans l'architecture, l'auteur invite à sonder l'imaginaire de la société féodale pour découvrir ce qui fascine les populations de ce temps chez ces trois hommes. La réponse ne se trouve ni en Orient ni dans les récits légendaires mais dans la signification de leur acte de charité : un don à un enfant qui est une offrande à Dieu.
Entre 1914 et 1919, la question de la paix occupe dans les imaginaires et dans les pratiques des sociétés en guerre une place beaucoup plus centrale que celle généralement établie par l'historiographie. Si la violence de l'affrontement diffuse largement ses effets à l'ensemble du corps social, elle est pourtant loin d'anéantir la culture de paix forgée durant les longues décennies de paix de l'avant-1914.
En temps de guerre, la paix constitue l'"horizon d'attente" des combattants et de l'arrière engagés dans une "guerre pour la paix", mais aussi une succession d'expériences éphémères permettant de s'évader temporairement du conflit (permissions, distractions, fraternisations, etc.). Elle devient une revendication de plus en plus obsédante à mesure que la perspective d'une paix victorieuse semble s'éloigner, conduisant les États belligérants à explorer secrètement les possibilités d'une paix négociée.
Grâce à une grande variété d'approches, croisant les dimensions militaires, politiques, sociales et culturelles de la Grande Guerre, cet ouvrage entend étudier ce va-et-vient, dans ce temps pétri par la violence, entre le souvenir de la paix d'hier et l'impatience de son retour, en insistant sur les ambiguïtés du discours de la paix en temps de guerre, ses difficultés d'expression dans un contexte de censure, comme son instrumentalisation quand il s'agit de définir concrètement cette paix ou de la mettre en oeuvre.
Contributions de :
Nadine Akhund, Julie d'Andurain, Anne-Laure Anizan, Gearóid Barry, Christophe Bellon, Carl Bouchard, Rémy Cazals, Antoine Champeaux, Landry Charrier, Michael Clinton, Emmanuelle Cronier, Paul Dietschy, Marie-Michèle Doucet, Rémi Fabre, Jean-Noël Grandhomme, Jean-Michel Guieu, Irène Herrmann, Norman Ingram, Stanislas Jeannesson, Valérie Lathion, Olivier Prat, Michel Rapoport, Philippe Salson, Anne Simon, Stéphane Tison.
La Mappa mundi d'Albi (ms. 29 de l'actuelle médiathèque Pierre-Amalric d'Albi), constitue l'un des exemplaires les plus anciens de représentation du monde en Occident. La cartographie antique n'est en effet connue que par des descriptions textuelles et des copies plus tardives. Cette carte présente une forme rare, en fer à cheval ; elle est orientée vers l'est et figure les trois parties du monde médiéval serrées autour de la mer Méditerranée : l'Asie en haut, l'Europe à gauche, l'Afrique à droite, et le détroit de Gibraltar largement ouvert en bas de la page. Le tracé des terres, à l'encre brune, se distingue des mers peintes dans une couleur verdâtre, de même que les fleuves. Des noms de lieux en latin permettent de reconnaître les éléments géographiques représentés : noms de provinces romaines, de cours d'eau, de villes et des îles principales de la mer Méditerranée. Le tout forme une image schématique de l'ensemble du monde tel qu'il pouvait être connu à la fin de l'Antiquité et au début du Moyen Âge en Europe occidentale.
Or, la Mappa mundi ne se présente pas seule : elle est conservée dans un manuscrit de parchemin, constituant un recueil de vingt-deux textes, copiés et reliés ensemble vers la fin du VIIIe siècle. Depuis l'époque de sa création, le manuscrit fait partie du fonds de la bibliothèque du chapitre de la cathédrale d'Albi (transféré à la bibliothèque municipale à l'époque contemporaine). Modeste localité située dans une campagne prospère, Albi devint une cité et un évêché au début du Ve siècle ; dès le VIIe siècle, un scriptorium et une bibliothèque en font un centre intellectuel et culturel important.
Bien que connus des spécialistes et souvent cités, la Mappa mundi d'Albi et le manuscrit dans lequel elle se trouve n'ont jamais fait l'objet d'une recherche approfondie. Lorsqu'en octobre 2015, ce document cartographique exceptionnel a été inscrit au registre Mémoire du monde de l'UNESCO, l'événement a été marqué par la création d'un groupe de recherche et d'un séminaire dont sont issus les articles de ce volume. Ils proposent d'aborder l'étude du manuscrit dans son environnement médiéval, ouvrant des pistes pour des recherches futures et soulignant des points de méthode. Il s'agit tout d'abord d'une interrogation sur le contexte historique et intellectuel du manuscrit et les preuves avancées pour sa datation. Il est question de la persistance des modèles cartographiques antiques, des possibilités matérielles de leur transmission et de leur réception à Albi, et du lien entre la mappemonde et les textes qui l'accompagnent. La comparaison avec d'autres mappemondes et d'autres ouvrages géographiques du haut Moyen Âge permet de mieux comprendre les usages de cette image du monde dans le contexte monastique du chapitre d'Albi et plus largement, de l'essor intellectuel de l'Occident médiéval à l'aube de la Renaissance carolingienne.
Qui connaît Célestine Ouezzin-Coulibaly, Jacqueline Chonavel, Loffo Camara, Marie-Hélène Lefaucheux, Germaine Guillé, Soeur Marie-André du Sacré-Coeur, Jane Vialle, Vicky Cauche, Aoua Keita, Renée Stibbe, Andrée Dore-Audibert, Jeanne Martin Cissé, Gisèle Rabesahala et tant d'autres? D'Afrique et de France, engagées dans des associations, des syndicats et des partis politiques, elles participèrent au grand mouvement des décolonisations. Ce livre raconte leurs combats pour les droits des femmes et pour l'égalité, interroge la possibilité d'un « Nous, les femmes » malgré les différences de couleur de peau et de culture, les inégalités de statuts et de droits, le racisme et la violence. Familier du monde anglophone, le terme de sororité est récemment revenu sur le devant de la scène politique et médiatique en France. Célébrée par les féministes, « soeurs politiques » en lutte, la sororité est aussi souvent considérée comme illusoire. À l'heure du féminisme postcolonial et de l'afro-féminisme, ce livre revient en arrière pour décrire les luttes communes mais aussi les rapports de domination entre des femmes blanches, noires et métisses, de la Seconde Guerre mondiale aux premières années des indépendances africaines. Il mêle histoire coloniale de la France et histoire de l'Afrique. Il interroge l'histoire des féminismes et de ses liens avec le communisme et l'impérialisme. Il inscrit l'histoire des mobilisations politiques des femmes d'Afrique dans une dimension transnationale. Au fil des pages, en dessinant les contours d'une improbable sororité au temps du colonialisme et de la guerre froide, il propose une autre histoire des décolonisations.
La cinquantaine de textes qui constitue ce recueil aborde l'histoire de l'art des XIXe et XXe siècles de façon différente selon qu'il s'agit d'analyser une oeuvre en visant la précision documentaire d'une iconographie (L'Evasion de Manet, Cirque de Seurat) ou de présenter un travail exposé parfois pour la première fois (Baselitz, Das Negativ). L'approche critique et l'analyse historique font ainsi partie d'une expérience au cours de laquelle l'idée de l'art moderne représentée par Manet, Degas, Berthe Morisot, Caillebotte, Seurat s'est trouvée confrontée après Picasso ou Pollock, à une nouvelle génération d'artistes, en Italie et en Allemagne. Ce qui ne va pas sans interroger les modalités du jugement, la fonction du style, la teneur même de l'interprétation quand il s'agit de Penck, Immendorff, Lüpertz ou Polke. Quelques textes abordent un état de la pensée (Kessler et Gide, Henri Focillon, Michael Werner) ; d'autres formulent un jugement d'ensemble (Lucian Freud, Francis Picabia, Edward Hopper) ; certains proposent des rapprochements (Nadar en double, Aberrations contemporaines, Kirkeby-Delacroix, A New Spirit in Painting). En fonction d'une diversité et d'une différence qui lui sont fondamentalement adressées, le discours sur l'art est à l'épreuve d'une compréhension qui a pour objet de se prêter à l'histoire sans pour autant s'y confondre. "Quand l'art fait des histoires" invite à considérer le rôle d'un artiste qui fait l'histoire. Il le fait en s'exposant au sens le plus large du terme comme ont pu le faire Van Gogh ou Rouault, Manet ou Cézanne avant eux. Aucun préalable doctrinal ne s'impose. Pour que l'histoire continue, il faut des histoires. Des histoires plus que jamais discontinues.
Troisième numéro de la revue Photographica, «Histoires-monde de la photographie» présente un dossier dédié aux réseaux de circulation et à la géographie de l'histoire du médium, en s'intéressant tout particulièrement à ce que l'on a souvent appelé les «autres histoires de la photographie», c'est-à-dire ici en dehors de l'Europe et de l'Amérique du Nord. Quelles histoires mondiales / mondialisées pour le phénomène photographique ? En quoi des micro-histoires connectées ou des enquêtes à l'échelle d'un photographe, d'une ville, d'une publication, et donc à une échelle réduite, peuvent «faire monde» et permettre de mieux connaître la production et les circulations des photographies en dehors mais aussi en lien avec les zones géographiques plus repérées de l'histoire du médium ? Avec ces interrogations méthodologiques et historiographiques en toile de fond, ce numéro propose plusieurs études de cas révélatrices de ces questions : un article de Margaux Lavernhe sur le photographe ghanéen James Barnor et les transferts technologiques de la photographie couleur, un texte d'Annabelle Lacour sur les pratiques photographiques des souverains dans l'Asie de la fin du XIXe siècle, un essai d'histoire spatialisée d'Alexandra de Heering sur les studios de la ville indienne de Coimbatore, ou encore un article d'Ecce Zerman sur la circulation d'un modèle photographique dans la presse illustrée de l'Empire Ottoman. La traduction depuis l'anglais d'un texte fondateur de l'anthropologue Deborah Poole sur l'économie des images, une page sur un portrait de l'impératrice chinoise Cixi, ainsi qu'une rubrique source consacrée à la revue Camera Obscura et un entretien avec Nicole Starosielski, historienne porteuse d'un projet sur l'histoire des réseaux et câbles sous-marins, viendront compléter ce dossier thématique.
Héritière de la bibliothèque de l'université de Paris ouverte en 1770, la bibliothèque de la Sorbonne est l'une de ces institutions anciennes et bien vivantes où, au fil du temps, se sont superposées des fonctions et des appropriations très diverses. Elle est d'abord, depuis plus de deux siècles, un outil de travail au service des étudiants et des professeurs des universités parisiennes. Mais, avec ses collections anciennes, sa position centrale au XIXe siècle dans l'université française, la monumentalité de sa salle de lecture, ou bien sa place dans la mémoire des cohortes d'étudiants qui l'ont fréquentée, elle est aussi devenue un objet patrimonial.
De cette histoire particulièrement riche et complexe, le présent livre entend rendre compte à travers une série d'entrées qui permettront au lecteur de revisiter quelques moments charnières, des projets fondateurs de 1765 à ceux de 2013. La trentaine de contributeurs qui ont participé à l'entreprise se sont également attachés à illustrer la vie des collections, évoquant les richesses conservées, les dons ou le prêt aux lecteurs, le travail des bibliothécaires, certaines figures marquantes, ou encore les relations fluctuantes avec les institutions voisines, partenaires ou rivales. La manière dont l'établissement a été perçu, dans et hors les murs, offre enfin une diversité de points de vue qui met en valeur la vie au long cours et la singularité d'un établissement exceptionnel.
Ont contribué à cet ouvrage : Jacqueline Artier, Jean-Claude Baillat, Marion Bernard-Schweitzer, Laurence Bobis, Arnaud Desvignes, Isabelle Diry-Löns, Sylvie Fayet-Scribe, Lucie Fléjou, Anne-Sophie Gallo, Valérie Grignoux, Anaëlle Guérin, François Haas, Georges Haddad, Claude Jolly, Ismaël Jude-Fercak, Amélia Laurenceau, Éléonore Marantz, Philippe Marcerou, Magali Mattern, Sylvie Meslet-Struyve, Victor Meunier, Laure Murat, Boris Noguès, Cécile Obligi, Géraldine Péoc'h, Vivi Perraky, Marie-Thérèse Petiot, Martine Poulain, Emanuele Romanini, Élodie Rousset, Emmanuelle Sordet, Marie-Brunette Spire-Uran et Pierre Verschueren.
Jessica Kohn examine dans cet ouvrage la construction du groupe professionnel des dessinateurs de bandes dessinées après la Seconde Guerre mondiale. Elle propose de renverser la perspective classiquement adoptée par les historiens bédéphiles depuis les années 1960. Autrement dit : passer d'une histoire « héroïque », marquée par une poignée de grands auteurs masculins et leurs chefs-d'½uvre, à une histoire sociale des métiers du dessin.
Il s'agit d'analyser le métier dans toute sa diversité, que ce soit en termes d'origine sociale ou de genre, de débouchés professionnels ou de types de pratique du dessin. En effet, dans les années 1950-1960, la transformation de l'offre éditoriale entraîne l'adaptation des pratiques professionnelles et, en particulier, une spécialisation progressive des dessinateurs vers la bande dessinée.
Chemin faisant, Jessica Kohn permet une immersion dans le milieu de la bande dessinée. Égrainant des noms d'auteurs et de maisons d'édition rarement cités, parfois même oubliés, elle donne à voir l'étendue du milieu professionnel de la bande dessinée en France et en Belgique et la diversité inattendue des productions graphiques dans les illustrés pour enfants.
Le second volume de ce Précis, auquel ont contribué vingt chercheurs, comble une lacune éditoriale dans la philosophie contemporaine francophone. Après une présentation exhaustive de la philosophie des mathématiques de l'Antiquité au XXe siècle, l'ouvrage traite de plusieurs questions cruciales : la confrontation de la théorie des ensembles et de la théorie des catégories comme cadre fondationnel pour les mathématiques, le constructivisme mathématique, l'analyse de la calculabilité et le dilemme de Benacerraf. Ce volume interroge également la philosophie de la pratique mathématique à travers les notions d'idéaux de preuve (en particulier l'explicativité et la pureté) et de preuves informelles, et l'usage d'artefacts visuels dans l'argumentation. Enfin, il explore l'applicabilité des mathématiques et le rôle de la probabilité.
Il s'adresse à la fois aux philosophes et aux étudiants de philosophie intéressés par les mathématiques, et aux mathématiciens et scientifiques qui souhaitent porter un regard philosophique sur leur discipline.
Le premier volume, consacré à la philosophie de la logique, est dirigé par Francesca Poggiolesi et Pierre Wagner. Le projet commun est d'offrir une introduction riche, pédagogique et claire aux principaux débats contemporains de philosophie des mathématiques et de la logique.
Ont contribué à ce volume :
Andrew Arana, Mark van Atten, Hourya Benis-Sinaceur, Mirna Džamonja, Maria Carla Galavotti, Sébastien Gandon, Guido Gherardi, Valeria Giardino, Yacin Hamami, Gerhard Heinzmann, Sébastien Maronne, Jean-Pierre Marquis, Daniele Molinini, Marco Panza, Fabrice Pataut, Frédéric Patras, Maël Pégny, David Rabouin, Andrea Sereni et Jean-Jacques Szczeciniarz.
L'Armée de libération nationale (ALN), en tant qu'unique force organisée dans le pays a, de fait, préfiguré l'État indépendant. L'ascendant de l'État-major de l'ALN en 1962, le coup d'État du 19 juin 1965, la tentative de putsch du chef d'État-major en 1967 ainsi que d'autres péripéties ont d'emblée situé l'armée au c½ur du pouvoir et de ses tumultes. Perçue comme « une boîte noire » parce que située au « c½ur du pouvoir », l'armée est à l'origine de nombreux mythes voire de fantasmes. Saphia Arezki s'applique à les déconstruire avec précision à travers l'étude concrète de la trajectoire d'officiers de l'ANP ayant contribué à la construction de l'armée nationale moderne. La mise en relief du parcours des hommes et des groupes dans leur contexte historique apporte un éclairage remarquable sur la construction aussi bien de l'institution que de l'État indépendant. Un livre indispensable qui restitue à sa juste mesure, et en l'incarnant, la place de l'armée dans le système politique algérien.
Extrait d'une revue ou d'un ouvrage relié à part en un petit livret. Destiné habituellement à faire connaître un article récemment publié, la collection détourne l'usage et la fonction du tiré à part pour inviter à la (re)découverte d'un texte. En lieu et place du traditionnel mot d'accompagnement de l'auteur, Laurence Bertrand Dorléac partage ici, dans une courte présentation, son expérience de lecture de : " Arcimboldo ou Rhétoriqueur et Magicien " de Roland Barthes.
L'empirisme logique, mouvement incontournable dans l'histoire de la philosophie analytique, apparut dans l'entre-deux-guerres viennois comme une réaction progressiste à la pensée métaphysique. Continuant la mission des Lumières, ce mouvement moderniste est représenté par le Cercle de Vienne formé de Moritz Schlick, Rudolf Carnap et Otto Neurath, entre autres scientifiques. Ce livre invite à une réflexion sur la dimension politique méconnue de l'empirisme logique à travers la vie et l'oeuvre d'Otto Neurath (1881-1945), figure notable de «?l'aile gauche?» du Cercle. Il examine comment les travaux innovatifs de Neurath en matière d'infographisme, sa vision pédagogique et son socialisme s'articulent autour de la philosophie néo-empiriste des sciences.
Extrait d'une revue ou d'un petit ouvrage relié à part en un petit livret.Destiné habituellement à faire connaître un article récemment publié, la collection détourne l'usage et la fonction du tiré à part pour inviter à la (re)découverte d'un texte.En lieu et place du traditionnel mot d'accompagnement de l'auteur, Florence Weber partage ici, dans une courte présentation, son expérience de lecture de : « Remarques sur le village comme cadre de recherches anthropologiques » de Marcel Maget.