Débrouiller l'écheveau complexe de la mémoire et des images, et singulièrement de la photographie, dans le texte autobiographique contemporain (celui-là même que l'on nomme parfois autofiction), telle est la tâche que s'est donnée l'auteur du présent ouvrage.
Un essai fait de patience et de passion, qui, quand il n'est pas une tentative de mise au jour d'une sorte d'inconscient visuel à l'ouvre, prend très vite les allures d'un roman familial à plusieurs voix. oú s'entrelacent les fils et ficelles de la ressemblance et de la différence, du mort et du vif, et, aussi bien, du masculin et du féminin : le fantasme de la réconciliation d'un auteur avec son image, en quelque sorte.
Plus que jamais, à l'ère du tout-image, l'écrivain est perçu comme un personnage double. Tandis que d'un côté, en effet, on peine à distinguer cette sorte de fantôme mythique, présence transparente qui écrit dans le secret de la langue et le retrait des idées, voilà que de l'autre côté il prend soudainement corps pour se prêter, de gré ou de force, au jeu des apparitions tous azimuts. Que s'est-il donc joué entre la " mort de l'auteur ", cet inquiétant leitmotiv qui fit néanmoins les beaux jours des années soixante, et sa résurrection sous la forme d'une icône quasi familière (si l'on peut dire...) dans les médias d'aujourd'hui. C'est par le biais de photographies, de films de télévision, mais encore de moments de cinéma ou de théâtre, qu'écrivains, critiques et autres praticiens nous aident à méditer, dans le présent volume, sur le portrait de l'auteur en général, et, aussi bien, sur les phénomènes de passages, de résonances, entre l'image d'un auteur et son oeuvre, sur une alchimie intime née de la fusion d'un " faire-voir " et d'un " faire-lire ".
Il s'agit ici d'un texte littéraire accompagné de 27 photographies en noir et blanc, publié dans la collection L'animal fabuleux.
Cette collection propose depuis quelques années de faire se répondre des textes littéraires avec des visuels de création (photographies, estampes, gravures etc.). Le principe est de ne pas faire de commentaires sur les images mais de tisser entre images et textes une certaine correspondance, voire une leçon d'équivalence. Texte et photos se répondent, entrent en résonance. Même si la priorité est donnée à une diffusion en littérature, il peut s'agir, selon les titres, d'une suite d'images assez importante voire dominante par rapport à la longueur du texte.
L'écrivain Roger-Yves Roche et le photographe Max Barboni se sont volontairement prêtés au jeu de cette collection. Les photographies d'arbres, de branches, de futaies trouvent un écho verbal dans le texte de fiction qui les accompagne. Roger-Yves Roche établit des liens entre photographie, littérature et peinture dans une approche personnelle de création fictionnelle. Le photographe lui même rend un hommage discret mais très fort aux grands photographes évoqués par l'écrivain : les photographies de Max Barboni témoignent d'une grande culture photographique dans laquelle on retrouve l'influence des pionniers de la photographie, d'Atget à Anne Brigman ou à Josef Sudek, et de grands photographes contemporains comme Pierre de Fenoyl, Alix Cléo Roubaud ou Raymond Depardon.