« Bonjour à tous, bonjour chers assistés, bonjour les patrons qui prennent des risques et bonjour les rentiers, les planqués, les gens de l'arrière, les salariés, ceux qui ignorent la compétition !
Et si la France était un pays d'assistés ?
« Ce magnifique pays d'assistés », c'est ainsi que nous voit The Guardian de Londres. Pays de fonctionnaires, de retraités, de profiteurs de l'État-providence. Certes, The Guardian reconnaît que grâce au système de Sécurité sociale il y a moins d'écart entre les riches et les pauvres en France qu'au Royaume-Uni ; mais ce système de providence étatique diminue notre esprit de conquête. Il faut redonner l'esprit d'audace à notre pays dit Jacques de Chateauvieux, un grand patron français du sucre et du pétrole. Refus du risque égale rente, égale peur ? Bureaucratie égal inefficacité ?
Vraies ou fausses questions ? Elle sont au coeur des reproches des patrons, qui ne cessent de râler contre les formulaires qu'on leur demande sans cesse de remplir et contre cette bureaucratie. qui ne se laisse pas faire. » B. M.
Ce mélange unique d'histoire économique, de liberté pamphlétaire, de traditions bousculées, de foucades, de bagarres utiles ou de mécontentements joyeux : c'est la parole de Bernard Maris ; et son regard incomparable. Mais oui, souriez, vous êtes Français ! Traversez notre beau et bizarre pays, comprenez-le, aimez-le, changez-le.
« Chacun sa France : les bobos, les enfants d'immigrés qui préfèrent le drapeau algérien, les patriotards qui font grincer les violons de l'identité et du roman national, les perdants, les banlieusards, les exilés fiscaux, les zemmouriens, les soixante-huitards, les syndicats sans troupes et les patrons mendiants, les profiteurs et les contempteurs des trente-cinq heures, les anti-média qui rêvent de passer dans la lucarne... Tous vivent dans une sorte de pays communiste qui marche ; et tous sont, malgré leur obsession de la dérision et leur méfiance du voisin, unis par quelque chose de désuet et vaguement ridicule : la France, cette bizarrerie qu'ils détestent aimer ou aiment détester. Comme les Anglais !
Ils sont fiers de Versailles depuis leur pavillon. Ils ont cru à la grandeur et vu beaucoup de petitesses, des jalousies, des blessures (1940, 1962), des supermarchés plutôt que cathédrales, de l'économie plutôt que des romans, des voies sur berge plutôt que des start-ups, des batailles de chiffres plutôt que des duels à l'épée... Ils se sentent coupables, médiocres, déclinants, absents, muséifiés, populistes, vaguement racistes, attendant de solder les derniers bijoux - une langue, une culture ; attendant aigrement l'Europe, la « mondialisation », les régions renaissantes...
Quel « pays imaginaire » leur offrir, qui soit leur pays véritable ?
Un pays qui retrouve ses paysages, sa beauté : ça coûte, mais peu. Qui retrouve son école : ça coûte, mais ça rapporte. Un pays qui redevient un laboratoire artistique et culturel, qui soit ce qu'il a souvent été, le phare intellectuel du monde. Un pays curieux au double sens, et tout à fait joyeux d'être communiste et libéral. Un pays où l'esprit surréaliste de Mai 68 puisse cohabiter avec Valmy, la Nuit du 4 Août, Versailles, la laïcité et les Médailles Fields qu'il collectionne... » Bernard Maris
Ils se battirent l'un contre l'autre, à la tranchée de Calonne, et furent blessés le même jour. Ces deux hommes, si jeunes, vécurent le même conflit, l'un germanophile, l'autre francophile, l'un et l'autre amoureux des lettres et du pays ennemi ; ils montrèrent une inconcevable ardeur au combat, tuèrent de leurs mains, et virent mourir. Ils devinrent deux immenses écrivains sous les bombes et dans l'horreur, par l'horreur ; ils racontent les mêmes choses, les mêmes lieux et la même sanie, et pourtant ne disent pas la même guerre.
Le Français, Maurice Genevoix, parle de chaque homme qui tombe, l'Allemand, Ernst Jünger évoque les soldats, l'armée, la nation. Pourquoi cette guerre ? Leur lecture croisée, cent ans après, donne un éclairage extraordinaire sur le premier conflit mondial. Interrogeant pour la première fois les deux plus grands écrivains du conflit, Bernard Maris s'approche d'un double mystère : celui de l'acharnement des combats, et de la singularité de nos deux nations, la française et l'allemande.
Il nous porte, avec Genevoix et Jünger, à la hauteur de cette Guerre dite "Grande" ; et ils portent la mémoire des soldats jusqu'à la pitié sans laquelle, depuis Homère, la guerre ne peut exister.