L'hospitalité est une pratique en apparence simple et universellement partagée. Il serait donc tentant d'en fournir une définition générique : l'hospitalité est l'institution qui règle l'interaction entre un accueillant (chez lui) et un accueilli (nouveau venu), consistant en un processus de familiarisation réciproque (faire connaissance, entretenir une relation, etc.). Elle a comme fonctions la dispensation de bienfaits, l'amorçage de la socialité, l'identification de l'étranger, ou l'intégration temporaire de l'invité.
L'hospitalité ne saurait néanmoins être réduite à une vertu privée. Elle est au contraire une pratique politique : elle institue des règles, des frontières, et des dispositifs d'intégration ou d'exclusion. Cet ouvrage expose les différentes formes qu'elle a pu revêtir, des sociétés traditionnelles à nos jours en explicitant les relations de pouvoir qui se jouent dans le langage vertueux de l'hospitalité. Une telle généalogie permet de retrouver les moments et les lieux clés qui ont façonné ce concept en le transformant, le déplaçant et le recomposant selon sa fonction politique.
Cet ouvrage, tout en répondant à une actualité brûlante et souvent tragique ouvre à une réflexion distanciée mais active afin de démocratiser les frontières.
Aujourd'hui les frontières sont devenues un lieu de pouvoir sans précédent où s'exerce un contrôle des flux, et où s'élaborent des justifications conflictuelles de ces contrôles. Ce qui s'explique non seulement par des flux migratoires plus massifs qu'auparavant, mais surtout par des flux n'ayant jamais été aussi politisés.
Les frontières des États-nations posent problème. Si elles peuvent protéger les citoyens et garantir la continuité des institutions, elles occasionnent également la mort de milliers de personnes et des formes éparses de domination. Comment penser ce dilemme des démocraties occidentales ? Que faire lorsque la liberté de mouvement ou l'égalité des personnes entrent en contradiction avec des pratiques de fermeture, de discrimination et d'exclusion ? Faut-il redéfinir nos valeurs ou changer nos pra- tiques ? En analysant les différentes résolutions de ce dilemme, depuis le nationalisme souverainiste jusqu'aux propositions d'un monde sans frontières, ce livre déconstruit les logiques qui gouvernent nos débats sur l'immigration et avance des arguments résolument démocratiques pour penser des frontières justes.