"J'aurais cette prétention : écrire ici quelque chose à propos de mon frère, car c'est déjà, si peu que ce soit, ébrécher ce discours qui réduit chaque fou à son étiquette diagnostique et qui, sans vergogne, se démultiplie frénétiquement."Psychiatre, Patricia Janody est sollicitée par Hamidou et Hawa au sujet de leur frère enfermé dans la maison familiale, en Mauritanie. La sorte de journal qu'elle se met à tenir et le voyage qu'elle entreprend avec eux font entrer en résonance son expérience professionnelle et son histoire personnelle.S'invente ici une écriture, qui mêle étroitement l'intime et la théorie, le proche et le lointain, la chronique et les notations cliniques, et qui interroge, ce faisant, le mythe de fondation de la psychiatrie.
L'écriture de ce livre repose sur l'étrange idée de lire en parallèle des fragments de discours schizophrènes et des textes de Descartes. Cette idée est née de la fréquentation quotidienne de patients schizophrènes que l'auteur vit dans le cadre d"une pratique psychiatrique. A les écouter, elle est saisie par leurs dires, tout à la fois jubilatoires et souffrants, directs, fuyants, lucides et insensés... Elle est frappée par une dimension de vérité, le plus souvent fugitive, qui les traverse, mais qu'il est difficile d'appréhender plus précisément là où les règles ordinaires d'énonciation paraissent ne plus avoir cours.
Comment se repérer dans ces discours ? Selon quelle perspective les aborder ? Plutôt que de vouloir appliquer à ces discours une grille de lecture qui leur reste extrinsèque, l'auteur a pris le parti de mener ici une lecture dans une double direction, en confrontant des dires schizophrènes aux Méditations métaphysiques de Descartes. Il ne s'agit ni d'opposer ni d'accorder philosophie et folie, mais de faire jouer chacun des discours comme opérateur de lecture pour l'autre.
Lorsque Monsieur O. déclare sa fureur homicide au nom du djihad, il fait aussi vaciller le lieu psychiatrique, là où une attribution de folie individuelle ne se distingue plus d'un affolement du lien social. Mais qui parle alors, qui écrit, et pourquoi ? Une psychiatre mise ici sur les discontinuités de sa mémoire, entre les mots imprévisibles d'un patient et le labyrinthe du délire de sa propre mère. Hors-zone fait suite à Zone frère (Epel, 2014).
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Patricia Janody exerce la psychanalyse à Paris. Elle a publié chez Epel Zone frère. Une clinique du déplacement (2014) et Hors-zone. Une clinique de l'embranchement (2016). Elle coordonne la revue Les Nouveaux Cahiers pour la folie.
Fraîchement débarquée à Mayotte pour un remplacement de psychiatre, Patricia Janody découvre un territoire marqué par l'arbitraire des frontières, où les Comoriens, hier voisins, se retrouvent aujourd'hui transformés en migrants illégaux. Elle y reçoit des patients privés de leurs voies usuelles de nomination : un homme délirant couvert de ses excréments, une femme endeuillée errant à travers champs... Entre les effluves d'ylang-ylang et les décharges à ciel ouvert, elle apprend qu'une odeur peut aussi véhiculer des fragments d'histoire coloniale.
Elle y reviendra régulièrement, s'impliquant dans des dispositifs d'équipe avec des traductrices maintenues dans un étrange statut. Bien décidée à défendre une clinique qui se développe loin des codages diagnostiques promus partout et sans vergogne.
Patricia Janody exerce la psychanalyse, et la psychiatrie en CMPP et en BAPU. Elle a publié chez Epel : Zone frère. Une clinique de déplacement (2014) ; Hors zone. Une clinique de l'embranchement (2016) ; Chers collègues inconnus. Zone 3 (2019). Elle coordonne la revue Les Nouveaux Cahiers pour la folie.
Les Nouveaux Cahiers pour la folie poursuivent leur navigation avec un septième numéro : Radophonie. Dans une période où tout concourt à faire taire les voix de la folie, et jusque dans les milieux psychiatriques, ils publient des contributions de personnes impliquées dans les différents bords de la folie et, pour certaines, interpellées par leur lecture des précédents numéros.
Dans une période où tout concourt à faire taire les voix de la folie, et jusque dans les milieux psychiatriques, Les Nouveaux Cahiers pour la Folie publient des contributions de personnes impliquées dans les différents bords de la folie et, pour certaines, interpellées par leur Lecture des précédents numéros.
Cette édition estivale des Écrits débute avec un troisième et dernier conte de Laurance Ouellet Tremblay, l'écrivaine en résidence, qui s'intéresse à la tyrannie de l'enfance. Les oeuvres de Stéphanie Morissette habillent le numéro, et Paule Mackrous signe le portfolio consacré à l'artiste. La Suite moldave présente des écrits de Jan H. Mysjkin, Marcela Benea, Calina Trifan, Moni Stanila, Andrei Gamart et Veronica Stefanet. En essai, théâtre, récit ou poésie, lisez des textes de Patricia Janody, Lise Gagnon, Marco Geoffroy, Julie Dugal, Réjean Plamondon, Hélène Laforest, Mathieu Croisetière, Zija Çela, Gabriel Robichaud et Emmanuelle Jimenez.