Le Petit Palais présente jusqu'au 23 janvier 2022 la première rétrospective française consacrée à Ilya Répine, l’une des plus grandes gloires de l’art russe. Peu connu en France, son œuvre est pourtant considéré comme un jalon essentiel de l’histoire de la peinture russe des XIXe et XXe siècles.
Une centaine de tableaux, prêtés notamment par la Galerie nationale Trétiakov de Moscou, le Musée d’État russe de Saint-Pétersbourg et le musée d’art de l’Ateneum d’Helsinki, dont certains très grands formats, permettront de retracer son parcours à travers ses chefs-d’œuvre.
Figure incontournable du monde de l’art de l’époque, Répine s’intéresse aux différents aspects de la vie culturelle : littérature, musique, sciences… Il est très proche de nombreuses personnalités russes comme l’écrivain Tolstoï, le compositeur Moussorgski, ou encore le collectionneur Trétiakov.
La grande rétrospective organisée par le Petit Palais, en partenariat avec la Galerie nationale Trétiakov de Moscou et le Musée russe de Saint-Pétersbourg, est l'occasion de faire paraître cette première monographie consacrée à Ilya Répine (1844-1930). Considéré comme le peintre russe le plus célèbre du XIXe siècle, l'artiste est généralement associé au courant réaliste. Témoin de tous les bouleversements de la Russie du XIXe siècle, Répine s'intéresse à la vie culturelle de son temps (littérature, musique, sciences...) et se montre particulièrement attentif aux profondes mutations que connaît son pays. Le catalogue met en lumière la diversité des sujets et des thèmes développés par l'artiste au cours de sa vie (tableaux de genre et d'histoire, portraits et peintures religieuses) et révèle la puissance d'un peintre à l'image de son art : passionnel et outrancier.
Ilya Répine (1844 Chuguyev -1930 Kuokkala) Ilya Répine était le plus doué du groupe que l'on appelait en Russie «Les Ambulants ». Dès l'âge de douze ans, il entre à l'atelier d'Ivan Bounakov pour apprendre le métier de peintre d'icônes. La représentation religieuse restera très importante pour lui. Il étudie ensuite à l'Académie des Beaux-Arts de Saint-Pétersbourg de 1864 à 1873 sous l'enseignement de Kramskoï. Il étudie deux ans à Paris où il sera fortement influencé par la peinture en plein air, mais sans pour autant devenir impressionniste, style qu'il jugeait un peu trop éloigné de la réalité. Épris de culture picturale française, il s'efforça de comprendre le rôle de celle-ci dans l'évolution de l'art contemporain. Entre 1874 et 1875, il expose au Salon de Paris et participe à la Société des expositions artistiques ambulantes à Saint-Pétersbourg.Un an plus tard, il obtient le grade d'académicien.
La plupart des oeuvres puissantes de Répine traitent des conflits sociaux dans la Russie du XIXe siècle. Il assit sa réputation en 1873 grâce à son célèbre tableau Les Bateliers de la Volga, symbole du peuple russe opprimé traînant ses chaînes. Cette lutte contre l'autocratie a inspiré bon nombre de ses oeuvres parmi lesquelles Confession et L'Arrestation du Propagandiste ou Ils ne l'attendaient pas. Il représenta également l'histoire officielle de la Russie dans des oeuvres telles que Ivan le Terrible et son fils. Considéré comme un des maîtres de la peinture réaliste, il s'est attaché à exprimer la vie de ses contemporains : écrivains, artistes, intellectuels les plus en vue de Russie, paysans en plein travail, croyants en procession, révolutionnaires sur les barricades. On compte également beaucoup de portraits de ses proches : Tosltoï, Gay. Il comprend parfaitement les peines du peuple, les besoins et les joies de la vie populaire, Kramskoï dira à ce propos : «Répine possède le don de représenter le paysan tel qu'il est. Je connais beaucoup de peintres qui représentent le moujik, et ils le font bien, mais aucun ne sait le faire avec autant de talent que Répine. » Ses tableaux, qui s'éloignent des contraintes académiques de ses prédécesseurs, sont délicats et offrent une plasticité puissante. Même dans ses natures mortes, il a atteint une maîtrise supérieure, trouvé de nouveaux accents pour transcrire la vibration colorée et brillante des aspects sensibles.
Ilia Répine est le peintre russe le plus célèbre du XIXe siècle. Représentant insurpassé du courant réaliste, il nous a laissé à la fois une oeuvre d'une qualité constante, entièrement réévaluée aujourd'hui alors qu'elle avait souffert de la comparaison avec des courants plus « modernes » comme l'impressionnisme, et un témoignage irremplaçable sur la vie russe d'avant la révolution.
Ami de Tolstoï durant trente ans, Répine est le peintre qui a le plus contribué à la diffusion de son image dans le monde entier. On trouvera ici réunis pour la première fois en français ses souvenirs sur Tolstoï et ses lettres adressées à l'écrivain et à sa famille. Précieux éclairage sur la vie du grand écrivain, ces lettres inédites en français nous renseignent également le travail du peintre.
En 1878-1879, autour de l'âge de cinquante ans et après avoir écrit Anna Karénine, Léon Tolstoï traversa une profonde crise de vie et de conscience, celle qui allait le mener à devenir celui qu'on sait, le quasi-prophète qui inspirerait Gandhi et des millions d'autres. Ma Confession est le livre crucial de cette crise, écrit en 1879, et depuis longtemps n'était plus édité.
Initialement prévu pour être une « Introduction à une critique de la théologie dogmatique » préfigurant une vaste oeuvre théologique en quatre parties, Léon Tolstoï en a finalement fait un texte court et simple parlant à tout être humain, le réceptacle de toute ces interrogations qui le hantaient depuis son enfance et qui sont celles de toute personne en ce monde :
« Qu'est-ce qui sortira de ce que je fais aujourd'hui ? de ce que je ferai demain ? Qu'est-ce qui sortira de toute ma vie ? » et « Quel est le sens de la vie ? », questions demeurant sans réponses pour lui et qui rendent la vie « impossible », et finissant par se transformer en une manière de concevoir Dieu et la foi qui ne pouvait que se heurter à l'Église orthodoxe et à tout dogme établi.
Complètement inconnue du public français et longtemps interdite par la censure, Confession, est une oeuvre bouleversante à consonances très largement autobiographiques et totalement originale. Tolstoï y déploie le paysage d'une âme désespérément séparée de Dieu, désertée par la grâce, seule face à l'obsession de la mort.
Une première tentative de publication eut lieu en 1882 dans une des plus grande revue de l'Empire russe mais le texte fut presque en totalité éliminé par la censure de l'Église orthodoxe. Il fut publié à l'étranger à Genève en 1884, avant d'être traduit en français en 1887. Il circula longtemps en Russie en manuscrits avant de connaître une première publication restreinte en 1906 et de devenir pour toute une génération le grand livre de cet idéal ascétique et mystique.
Aveu d'une puissance rare, même chez un écrivain aussi considérable, précisément parce qu'il abandonne tout artifice littéraire, inévitablement entaché de péché dans sa nouvelle vision du monde, pour conférer aux mots une sorte d'énergie primitive, une signification transparente libérée de toute médiation.
Nous sommes ici au coeur de la vérité tolstoïenne si proche de la sainteté, témoins fascinés d'une expérience unique, relatée dans une langue limpide et par-là même universelle.
Comment Répine, ce célèbre peintre russe qui chevaucha la deuxième moitié du XIXe?siècle et le premier tiers du XXe, parvint-il à créer son premier chef-d'oeuvre, les Haleurs de la Volga, qui le rendit célèbre dès le début des années 1870 aussi bien en Russie qu'au-delà de ses frontières?
Fondée sur les mémoires et la correspondance du peintre, cette monographie au souffle romanesque retrace la jeunesse et les débuts de Répine à l'Académie des Beaux-Arts de Saint-Pétersbourg jusqu'à son expédition sur la Volga où il immortalisera parmi «?ses?» haleurs l'inoubliable Kanine dont la stature imposante ne le quittera plus.
Après les Haleurs qui occupent une place centrale dans son oeuvre, d'autres tableaux entrent en scène dans les genres les plus variés, consacrant Répine comme un peintre éclectique hors pair.
Au fil des pages, le lecteur pénètre dans l'univers artistique et les débats qui animent Répine et ses contemporains. Il découvre aussi les relations étroites du peintre avec deux grandes personnalités, Stasov, le célèbre critique d'art qu'il accompagna dans deux voyages à l'étranger et Tolstoï, devenu son ami, dont il fit plusieurs portraits et tableaux et qui lui rappelait étrangement la figure imposante de Kanine, son héros-haleur...
A l'heure oú l'europe s'ouvre avec curiosité à la connaissance de l'art russe, la mise en lumière de ce fonds de dessins de peintres russes du xixe siècle nous fait revivre les pérégrinations d'artistes en quête de leur identité culturelle, au travers de leurs voyages d'étude en occident ou de leur fascination pour les charmes d'un orient proche.
C'est à la faveur d'un legs que le cabinet des dessins du musée d'art et d'histoire de genève s'est enrichi en 1899 de cet ensemble et c'est à pauline couriard, femme peintre et épouse d'un médecin genevois établi à saint-pétersbourg, que furent initialement offertes ces pages, en remerciement de son engagement dans le monde artistique de son époque. plusieurs oeuvres issues des collections du département des beaux-arts du musée d'art et d'histoire, de la bibliothèque de genève et de la société des arts de genève, complètent ce voyage fascinant et inédit.
Boule, un pauvre chien errant des rues de Moscou, est recueilli par l'éminent professeur Préobrajenski qui l'emmène à son domicile.
En ces temps troublés qui suivent la révolution de 1917, le scientifique, privé de son laboratoire, entend bien poursuivre chez lui son ultime expérience. Au risque de donner vie à un être incontrôlable.
Interdit par la censure dès sa rédaction, en 1925, ayant circulé « sous le manteau » pendant des décennies jusqu'à sa publication en Occident à la fin des années 1960, Coeur de chien est sous le couvert du fantastique une féroce et hilarante satire du nouvel ordre soviétique et d'un système absurde visant à la création de l'« Homme nouveau ».
Parue en 1990 à Moscou et jamais rééditée, cette superbe traduction d'Alexandre Karvovski rend à ce texte incomparable son irrésistible et inquiétante drôlerie.
Les rues tortueuses de Malá Strana, quartier de Prague, résonnent de rumeurs et de fantasmes, de rancunes et de rivalités, d'amours déçues et de destins brisés. On y croise tour à tour un mendiant soi-disant fortuné, un cadavre encore vif, une vieille fille deux fois veuve, des enfants bien décidés à envahir l'Autriche...
Jan Neruda met en scène avec humour la vie et le caractère des habitants de Malá Strana - littéralement, « le petit côté » le quartier de Prague dans lequel il a grandi et vécu. Ses tableaux de Malá Strana sont avant tout des études sociales : plus que les lieux, ce sont leurs habitants qui l'intéressent. Et, pour notre plus grande joie, il prend un malin plaisir à les croquer de sa plume brillante et pleine d'autodérision. Leur portrait n'est guère flatteur : les personnages qui peuplent ces contes sont le plus souvent mesquins, âpres au gain, préoccupés uniquement de leurs petits intérêts, prompts à médire les uns des autres, pleins d'une méchanceté toute à leur mesure, à la fois enflée et étriquée.
Avec cette série de portraits, le satiriste qu'est Jan Neruda a une riche matière pour exercer son talent. En quelques lignes à peine, il dresse des portraits savoureux et pleins d'esprit. Chacun de ces contes regorge de perles que le satiriste a semées avec malice, avec une prédilection marquée pour l'humour noir.
Il arrive cependant que l'ironie douce-amère du satiriste laisse place à une autodérision attendrie. La peinture sociale se fait alors plus discrète, elle s'efface devant les souvenirs lyriques et intimes : ce n'est plus le petit peuple de Malá Strana que Neruda met en scène, mais son enfance passée à courir et jouer dans les rues de ce quartier. Le satiriste est sans doute féroce avec ses personnages, mais derrière le mordant de ses traits pointe la nostalgie de son enfance et son amour pour le quartier qui l'a vu naître et grandir.
A sa mort, Malá Strana a fait de lui son écrivain fétiche et une ancienne rue fut rebaptisée en son nom.
Malgré sa mesquinerie, le petit peuple de Malá Strana a aussi ses grandeurs.
Guérassime, sourd-muet de stature colossale, sauve un jour une petite chienne de la noyade : celle-ci lui voue un attachement éternel et devient le centre de son existence. Mais Guérassime est un serf, et la maîtresse du domaine auquel il appartient, vieille dame autoritaire et capricieuse, n'apprécie pas ce petit animal qui a osé lui montrer les dents et dont les aboiements la réveillent...
Écrit en prison en 1852, alors que Tourgueniev était incarcéré pour des propos que contenait son article sur Gogol qui venait de mourir, Moumou, dont la figure de la dame-propriétaire tyrannique est inspirée de la mère de l'auteur lui-même, était après les Mémoires d'un chasseur un nouveau réquisitoire terrible contre le servage, qui allait finir par être bientôt aboli, et est devenu un des textes les plus célèbres et populaires de la littérature russe.
La paix soit avec vous, l'une des dernières (sinon la dernière) oeuvres de Vassili Grossman, est à lire comme le testament d'un écrivain, le bilan de sa vie.
À l'automne 1961, Vassili Grossman, malade, désespéré par la saisie de son dernier roman Vie et destin, accepte de passer un mois et demi en Arménie pour travailler à la mise en forme littéraire d'un roman traduit de l'arménien.
Sa tâche accomplie, il entreprend, le 30 décembre 1961, de rédiger ses «impressions arméniennes» ?
Prenant le prétexte de «notes de voyage», Vassili Grossman parle ici de ce qui lui tient le plus à coeur :
Le peuple, les gens «simples» pas si simples que cela, le martyre arménien (et parallèlement, le martyre juif), la foi, la poésie, l'art.
Impossible en lisant ce livre, de ne pas songer à Vie et destin. Car tous les thèmes, tous les motifs y ont été puisés. Mais La paix soit avec vous, véritable «poème», est un livre lumineux, empreint de lyrisme et de sérénité. Au soir de sa vie, Vassili Grossman jette sur le monde et lui-même un regard plein de compassion et d'ironie mêlées. La joie l'emporte sur la souffrance, et la foi en la bonté sur l'amertume. Jamais l'auteur n'a montré tant d'abandon, jamais il n'a mis à nu, avec une telle sincérité, son âme et son corps.
Refusant la suppression de certains passages où il évoque l'antisémitisme soviétique, Vassili Grossman ne verra pas la publication de son texte. Celui-ci ne paraîtra qu'après sa mort, en 1965 et 1967, avec, dans les deux cas, les coupures exigées. Il a fallu encore vingt ans pour que la censure soviétique autorise enfin la publication du texte intégral, tel qu'on pourra le lire ici dans sa traduction française.
« Que ressent une époque en train de périr envers ce qui vient à sa place? » L'imposant André Babitchev, éminent et arrogant membre du trust soviétique de l'industrie alimentaire et directeur d'une usine de saucisses dernier cri, recueille chez lui un homme qui dormait ivre au coin d'une rue, un homme que la nouvelle société a laissé sur le côté, Nicolas Kavalérov.
Celui-ci devient pour un temps son serviteur et son parasite:
Car le véritable protégé de Babitchev, Volodia Makarov, le prototype de l'homme nouveau, le jeune footballeur triomphant qu'aime la jeune fille dont Kavalérov est lui-même amoureux, sera bientôt de retour...
D'un côté les hommes nouveaux, sportifs, matérialistes, soucieux d'hygiène et de rendement. Au xixe siècle ils dissé- quaient les grenouilles, aujourd'hui ils construisent des avions et des combinats géants de saucisses. De l'autre côté l'éternel « homme du souterrain », intelligent et inutile, individualiste et terré dans son trou, dévoré par l'envie. [...] La sobriété de style d'un Bounine, la sophistication des constructivistes, l'imper- tinence d'un dandy se marient au burlesque et à l'inquiétant. (G. Nivat).
Fable symbolique d'une ironie féroce sur le fossé entre ceux du monde d'hier et qui ne sont rien et les vainqueurs du monde nouveau, L'Envie remporta à sa parution en 1927 en Union soviétique un immense succès : il était le roman crucial de son temps... Si moderne !
Ce volume contient sept des plus belles nouvelles de l'écrivain : « Trois roubles, La Grammaire de l'amour, Nuit en mer, Coup de soleil, Casimir Stanislasovtich, Ida, Le Sarafane de Mordovie ». Il reprend le volume « La Grammaire de l'amour » paru en 1997 aux éditions Sables à Toulouse, augmenté d'une septième nouvelle.
Un jeune homme, Ivan Timofeïevitch, en mission pour plusieurs mois aux confins de l'Empire russe, dans une région reculée et sauvage à la limite de la Russie, de l'Ukraine et la Pologne, vit dans un village où les habitants le regardent avec méfiance, et a pour seule compagnie un paysan auquel pour passer le temps il tente d'apprendre à lire et écrire. Un jour, parti chasser, il s'égare et tombe par hasard sur une pauvre cabane, perdue au milieu des forêts, où vivent une vieille femme et sa petite-fille, la jeune et belle Olessia.
Olessia lui fait retrouver le chemin du village, et lui explique que toutes deux vivent à l'écart de tous car les villageois les considèrent comme des sorcières...
Dans la solitude de la nature, dans le silence des forêts, une des plus belles histoires d'amour de la littérature russe, et de toute la littérature.
Comme on laisse passer l'amour possible est une préoccupation majeure dans l'oeuvre d'Alexandre Kouprine. Elle se conjugue avec le témoignage réaliste dont est victime la beauté singulière. La sorcière supposée du récit Olessia (1898), la jeune juive, la mal mariée résignée de force, ces différents personnages semblent voués à disparaître dans l'oubli et l'incertitude, bannis par les frayeurs de la communauté, ses codes, sa violence et sa délation.
Très célèbre en Russie, Olessia était l'un des récits favoris de son auteur et largement autobiographique.
Il a fait l'objet de plusieurs adaptations au cinéma, dont l'une en 1956 avec Marina Vlady et Maurice Ronet : La Sorcière.
Une jeune épouse qui refuse de se plier aux règles de sa nouvelle zadrouga, ces communautés familiales élargies de Serbie, un soldat amputé qui revient de la guerre contre les Turcs et qui est accueilli par son père, une jeune fille qui part faire des études dans la capitale et fait la fierté de son village, un père qui sombre dans la spirale du jeu au désespoir de sa famille,... « scènes de la vie serbe » que restituent merveilleusement ces cinq nouvelles de Laza Lazarevic, un des auteurs les plus chers aux coeurs des Serbes, qui fit découvrir à l'Occident ce pays mystérieux, depuis peu délivré du joug ottoman.
Des voyageurs traversant un des immenses lacs russes demandent au moine singulier et colossal qui les accompagne de leur conter narrer ses aventures.
C'est ainsi que cet étrange moine raconte comment sa mère, morte en couches, l'avait promis à Dieu et à la vie monastique et comment, pour avoir refusé ce destin, il fut poursuivi par une curieuse malédiction, voué à errer sur la terre russe, tour à tour prisonnier des Tatars, compagnons des Tziganes, expert et dresseur de chevaux des steppes, soldat et même criminel, échappant sans cesse à la mort pour tomber dans un autre péril.
Conte symbolique et intemporel, Le Pèlerin enchanté est une extraordinaire odyssée à travers la Russie.
« Je suis venu au monde pour voir le soleil. » Prédestination ou choix volontaire, le poète russe Constantin Balmont est en effet le poète des « Visions solaires » et des élans hardis. En janvier 1912, Balmont, qui s'est exilé en France pour fuir le régime tsariste, part pour un tour du monde qui le conduit en Afrique du sud, en Inde, en Nouvelle-Zélande, en Polynésie, dans ces terres baignées de soleil et de civilisations disparues ou en train de disparaître sous le poids du monde moderne. Ces récits de voyage, ajoutés à ceux écrits par Balmont lors de voyages au Mexique en 1905 et au Japon en 1916, furent traduits en 1923 en français par son amie Ludmila Savitzky pour donner ce livre unique où la prose poétique sublime de Balmont témoigne de la joie solaire de ces terres lointaines. Une redécouverte magnifique.
Le tsar Alexandre se rend en Angleterre où il observeles merveilles de l'industrie florissante de ce royaume etreçoit moult présents que son fidèle serviteur le cosaque Platov n'a de cesse de dénigrer. L'un d'entre eux pourtantles stupéfie : une puce dansante entièrement mécanique.
Les orfèvres anglais sont-ils à ce point supérieurs à ceux de l'empire du tsar ? Il en va de l'honneur des plus doués des artisans russes, dont parmi eux le Gaucher bigle de Toula.
Présenté par un narrateur narquois qui ne semble pas tout comprendre aux événements, à mi-chemin entre légende populaire et conte satirique, Le Gaucher témoigne avec malice et humour des rapports de la Russie avec l'Ouest.
On pénètre dans le Ravissement comme dans un conte. Le personnage principal, Lavrenti, est un brigand des montagnes, fou de meurtres gratuits et d'exactions, fou de ses rêves. Un univers merveilleux hors de l'espace et du temps.
C'est dans un hameau de montagne, « au nom incroyablement long et compliqué, que même ses habitants ne savaient prononcer », et qui « tirait sa gloire d'être exclusivement peuplé de goitreux et de crétins », que le brigand va découvrir la femme aimée qu'il va devoir conquérir : Ivlita, sorte de Blanche-Neige illuminant de sa présence un univers de glaciers et de forêts, où les hommes sont des monstres dégénérés.
C'est un monde féerique, où la laideur, puisqu'elle est la règle, n'est plus conçue comme telle et où se cache la beauté pure, Ivlita, fille unique d'un ex-forestier lui aussi affligé d'un goitre, « mais si peu apparent qu'il pouvait passer pour une pomme d'Adam. » Toutes les interprétations sont possibles dans ce roman à surprises, à précipices, riche de mots inventés, de syntaxe tarabiscotée et d'un fort accent de la Géorgie natale de l'auteur.
Écriture en abime où les paragraphes, les chapitres, le livre lui-même, ignorent le point final et vous laissent en plan, au bord d'un inconnu qui ravit le lecteur. Aux marges du surréalisme et du réalisme magique, dans un véritable éblouissement d'images, d'inventions verbales et sonores, d'humour fantastique et drolatique, une légende de mots fous et d'amour fou.
Inclassable.
« Un roman. Et peut-être bien le plus original de la littérature russe de ce siècle. Cocasse, railleur, satirique, faussement mystique, fantastique, surréel. Le Ravissement est un livre hors-normes. Libre, aérien, vivant et fatal comme une épopée populaire, et, parmi une époque d'expérimentations littéraires, bien à l'opposé de ce que les expérimentations littéraires peuvent avoir de sec, de glacé, d'artificiel. L'histoire passionnée d'un brigand et d'une belle surnaturelle au chevet des neiges éternelles d'un pays de contes de fées. Une poésie de la nature. » (extrait de la préface de Régis Gayraud.) Étrange livre que ce roman magique et mystérieux, resté largement ignoré depuis sa parution confidentielle en 1930, connu de quelques poignées de lecteurs émerveillés par son réalisme cru, son ironie et sa prose envoûtante.
Etrange livre à l'étrange titre, qui s'empare de tous les sens du mot « ravissement » : rapt, ravage, extase, émotion, exaltation, qui ponctuent toute l'action du roman.
Les traductions, célébrées, de Gabriel Arout (Aroutcheff), dramaturge et écrivain d'origine russe sont reconnues comme parmi les plus belles des nouvelles de Tchekhov mais jamais rééditées jusqu'à présent.
Le Moine noir est suivi de deux autres nouvelles : Une morne histoire et Volodia Avec une très belle préface de Daniel-Rops, de l'Académie Française.
Trois nouvelles tragiques. Une plongée au plus profond de l'Ame humaine.
Un sommet de la littérature.
Légende ou réalité, cet inquiétant moine noir dont le retour est annoncé dans nos contrées, après une disparition de mille ans ? Réalité, répond Kovrine, le héros du récit, brillant universitaire. philosophe, qui a l'heur - ou le malheur - de rencontrer le moine et de disputer avec lui. Légende, réplique l'entourage de Kovrine, qui ne voit là qu'affabulations et visions malsaines de sa part... Légende ou réalité, l'histoire du moine noir fournit à Tchekhov le prétexte à une réflexion sur le bonheur et le génie, les êtres d'exception et le lot commun. Puissance obscure, le moine noir incarne la tentation de l'orgueil pour le héros qui y cédera, semant autour de lui malheur et souffrance. Le juste prix de sa témérité sera la perte du Jardin d'Eden de l'enfance.
La nouvelle ne passa pas inaperçue. Le critique Mienchikov avoua avoir été effrayé par le récit de la maladie mentale du héros, et il n'est pas le seul. Tolstoï trouve la nouvelle « ravissante ». Meyerhold la placera plus tard parmi les meilleurs récits de l'auteur.
Une morne histoire . Quels étranges liens unissent la jeune Katia et le vieux professeur d'université Nicolaï Stépanovitch ? Il a regardé grandir l'orpheline, l'a vue amoureuse et heureuse, puis souffrante et désespérée. À l'automne de sa vie, Nicolaï a perdu toutes ses illusions et partage avec Katia les mêmes ténèbres et les mêmes silences, sans pouvoir lui tendre la main... Une nouvelle sombre et cruelle où bonheur et amour semblent inaccessibles.
Volodia est un jeune homme de dix-sept ans. Il est laid, gauche et mal dans sa peau. Invité avec sa mère à la campagne chez les Choumikhine, ils sont reçus comme des parents pauvres, son amour-propre en souffre. Il tombe amoureux d'une cousine lointaine, Niouta :
Elle est mariée, elle a trente ans et se moque continuellement de lui. Elle lui cède, il a quelques minutes de bonheur dans le couloir. Le lendemain, il rentre avec sa mère dans la pension de famille où ils habitent, trouve un revolver et se suicide.